C'est la fin de l'union sacrée. Jusqu'à aujourd'hui, ils étaient soudés autour du Conseil national de transition (CNT), mais les habitants de Benghazi ne voient pas grand-chose évoluer depuis la libération du pays. Alors, les appels à la mobilisation tournent sur les réseaux sociaux avec plusieurs mots d'ordre : «Non à l'opacité». «Non à la corruption». «Non aux opportunistes...»
Les manifestants ont le sentiment que les nouveaux dirigeants libyens sont loin, très loin du peuple. Qui sont-ils ? Que font-ils ? Comment gèrent-ils l'argent du pays ? Personne ne sait vraiment.
Abir Imnina, professeur de Sciences Politiques à l'université de Benghazi analyse les inquiétudes : « les gens voient que les autorités n'ont rien fait et c'est pour cela qu'ils manifestent. On a eu ça pendant 40 ans, et ce n'est pas aujourd'hui qu'on va l'accepter. C'est nous qui avons fait la révolution ! Il faut changer le conseil local de Benghazi. Il faut penser aux jeunes, aux femmes... Personne ne sait qui est le CNT. Il vit dans un autre monde, une autre vie ! Notre colère est justifiée ».
Face à cette colère, le numéro 1 du Conseil, Moustapha Abdeljalil répond : « patience » Mais certains n'ont déjà plus confiance. En annonçant que la Libye était capable de pardonner aux partisans de l'ancien régime ayant combattu les ex-rebelles, il s'est attiré les foudres des protestataires. Des manifestants sont allés jusqu'à brûler le portrait du chef du CNT qui était pourtant acclamé par la foule de Benghazi après la mort de Mouammar Kadhafi.
Lundi 12 décembre, des milliers d'opposants aux nouvelles autorités se sont rassemblés sur la place al-Chajara où avait eu lieu la première manifestation contre Mouammar Kadhafi, en février. Alors que certains passaient la nuit sur cette place, le lendemain, les pro-CNT se retrouvaient sur la place Tahrir, autre lieu symbolique du soulèvement pour renouveler leur soutient à Moustapha Abdeljalil.
Le Premier ministre Abdel Rahim al-Kib a désigné les membres de son gouvernement le 22 novembre dernier avec pour mission de préparer des élections constituantes dans un délai de huit mois maximum, suivies d’élections générales, un an plus tard.