Trois questions à … Dieudonné Niangouna

Le dramaturge congolais qui a présenté aux Francophonies en Limousin sa nouvelle pièce Le Socle des vertiges, parle de sa conception du théâtre.

RFI : Que représente le théâtre pour vous ?

Dieudonné Niangouna : Je vois le théâtre comme un combat que les dieux se livrent pour influencer le destin du monde. La scène est le champ de bataille où se joue l’avenir de l’humanité. En somme, il s’agit d’un combat idéologique entre les humains par dieux interposés. Cette vision que j’ai héritée de ma culture où la parole artistique a partie liée avec les mythes fondateurs, n’est pas très éloignée de l’idée que les Grecs se faisaient du théâtre. Lorsque les protagonistes entrent en scène dans Le Socle des vertiges, la bataille est finie depuis belle lurette. Les gladiateurs ont crevé leurs javelots. Je raconte en rétrospectif ce qui s’est passé, la défaite de la pensée et les préparatifs pour de nouveaux combats qu’il va falloir mener. Car il faut continuer à nous battre pour rester vivant.

RFI : Vos personnages semblent se battre aussi pour mettre fin à la domination, la misère, l’absence de perspectives politiques…

Le Socle des vertiges est une pièce évidemment politique. Elle puise son sens dans les tensions politiques de la période postcoloniale. Partant d’une histoire familiale, le texte évoque les dérives du politique dans le Congo indépendant et les inscrit dans la suite de l’histoire coloniale. Il y a une continuité entre la colonisation et les crimes de la période postcoloniale. C’est pourquoi Le Socle des vertiges remonte à l’expédition de Brazza, à la Conférence de Berlin et aux autres moments de l’histoire coloniale. Il y a des relations entre le passé et le présent, la petite et la grande Histoire. Ce sont ces relations que mon théâtre tente d’explorer et de tirer au clair.
 

RFI : Pour vous, la scénographie est importante. Comment s’articulent la mise en scène et le texte ?

Ma mise en scène n’a pas pour objectif d’illustrer le texte, mais de faire chair avec la parole. Le rapport est celui de la continuité et du prolongement poétique. Là où la parole s’arrête, naît l’image que donne à voir la scénographie à travers la vidéo ou à travers la configuration des objets qui se trouvent sur scène : l’argile, la sciure de bois, les fils barbelés…

Le Socle des vertiges : A la Criée, à Marseille, les 11 et 12 octobre 2011 ; au Théâtre de Nanterre-Amandiers du 9 novembre au 4 décembre ; au Théâtre de Saint-Quentin en Yvelines du 4 au 6 avril 2012 et à la Comédie de Reims du 11 au 13 avril. 

 

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