Le fossé se creuse chaque jour d'avantage entre les affirmations du colonel Kadhafi et la réalité sur le terrain. Le 27 février, encore, dans une interview accordée par téléphone à une télévision serbe, le vieux guide a une nouvelle fois assuré que la situation était calme dans son pays, que les gens tués l'avaient été par des terroristes et qu'il ne restait qu'un petit groupe d'opposants, qui était neutralisé.
Pendant ce temps de nouvelles villes et régions passent sous le contrôle des opposants. De nouvelles bourgades de l'ouest sont tombées ces dernières heures notamment dans le djebel Nafusa comme Nalout où la statue du livre vert a été déboulonnée, et le siège des services secrets, incendié. A Zahouiya à 60 km à l’ouest de Tripoli des journalistes ont assisté à des manifestations dans les rues demandant le départ de Kadhafi. A Benghazi, fief de la contestation, un Conseil national indépendant chargé de représenter toutes les villes libérées de Libye a été créé.
«Tripoli prise en otage»
L'objectif est désormais pour beaucoup d'aller libérer la capitale, Tripoli. Selon un général passé du côté des insurgés, le colonel Kadhafi ne dispose plus que de quelques unités. La capitale Tripoli est « prise en otage » dit-il.
Sur place, les habitants témoignent d'un calme relatif. Les gens se terrent toujours chez eux. Seuls les miliciens du colonel Kadhafi continuent à circuler. A l'aéroport des foules immenses attendent encore de pouvoir quitter le pays.
Plus de 100 000 personnes ont déjà quitté le pays, notamment par la route, via la Tunisie. Très peu d’Africains d’origine subsaharienne franchissent le poste frontière de Ras Jedir. Mais hier, des Soudanais, et plus d’une centaine de Maliens ont réussi à sortir de Libye après plusieurs heures d’attente.
Si l’Union européenne, la Chine, la Turquie ou encore les Etats-Unis ont mis en place des programmes pour évacuer leurs nationaux par bateaux de Benghazi, de nombreux immigrés africains, notamment du Cameroun, du Mali ou du Burkina Faso, ou encore du Ghana, n’ont reçu aucune aide de leur gouvernement. Ils vivent dans la peur car la population libyenne les associe aux mercenaires engagés par le régime Kadhafi pour réprimer dans une violence sans pareille le soulèvement révolutionnaire dans la deuxième ville du pays, qui est désormais entre les mains des insurgés.