Avec notre correspondante à Tunis, Léa-Lisa Westerhoff
C’est dans une ambiance électrique que la réunion du Conseil des ministres a démarré. Très vite, un petit groupe de cinquante personnes s’est rassemblé devant le bâtiment où se réunissaient ces ministres.
L’arrivée la plus tendue a été sans aucun doute celle du ministre de l’Intérieur, Ahmed Friaa, qui était en poste déjà sous Ben Ali. L’homme est arrivé dans une voiture blindée, entouré de garde-du-corps. Il est sorti littéralement cerné par cinq hommes, complètement cagoulés et habillés de noir, lourdement armés de mitraillettes. Personne n’a pu l’approcher, mais dès qu’ils l’ont vu, les gens se sont mis à hurler en cœur à son intention : « dégage, dégage ! ».
A l’image de ce qui se passe en centre-ville avec les manifestations, le rejet est très fort pour les ministres qui étaient déjà en poste sous Ben Ali, tout particulièrement le ministre de l’Intérieur puisque, en un mot, c’est lui qui a donné l’ordre de tirer à balles réelles ces dernières semaines sur les manifestants. Donc la majorité des gens ne le supporte plus et voudrait le voir partir.
Comment purger le gouvernement de son influence ?
Quels sont les sujets au menu du tout premier Conseil des ministres de l’après Ben Ali ? La mission du jour, c’est déjà de commencer à faire fonctionner ce gouvernement de transition déjà bien fragilisé avec la démission de cinq ministres puisque la dernière a été annoncée tout à l’heure. Un membre du RCD, l’ex-parti au pouvoir, a démissionné.
Qui va remplacer ces cinq sièges vacants ? C’est l’une des questions à laquelle ce Conseil devait répondre.
Au menu aussi, des discussions sur une loi d’amnistie générale, une loi qui concernerait tous les prisonniers politiques du pays. Plusieurs dizaines de milliers de personnes seraient concernées et c’est l’une des demandes les plus anciennes de la société civile en Tunisie.
Et puis devait être discutée enfin la séparation de l’Etat et du parti au pouvoir sous Ben Ali, le RCD. Comment purger le gouvernement de son influence ? C’est un sujet crucial puisque la population continue de manifester en ce moment même contre la présence de ce parti au sein du gouvernement.