Six suspects poursuivis par la CPI pour crimes contre l’humanité au Kenya

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a remis ce mercredi matin 15 décembre ses conclusions sur l’enquête concernant les violences survenues au Kenya en décembre 2007 et début 2008. Six suspects sont visés par Luis Moreno Ocampo, qui entend conduire deux procès.

De notre correspondante à La Haye, Stéphanie Maupas

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno Ocampo, a déposé devant les juges deux requêtes, dans lesquelles il demande l’émission de citations à comparaître contre six responsables kenyans. Le procureur accuse les six hommes d’avoir commis des crimes contre l’humanité lors des violences qui avaient suivies les élections de décembre 2007 au Kenya. Luis Moreno Ocampo vise six responsables kenyans, parmi lesquels trois ministres du gouvernement d’union actuel, formé au terme d’un accord qui avait mis fin aux violences, dont le vice-Premier ministre et ministre des Finances, Uhuru Kenyatta, le fils du premier président du Kenya indépendant, et le ministre de l’Enseignement supérieur, William Ruto.

Deux procès

Le procureur entend conduire deux procès, impliquant chacun trois accusés. D’un coté, des responsables du gouvernement d’alors, dont Uhuru Kenyatta, l’ancien chef de la police, le général Hussein Ali et Francis Muthaura, l’ancien président du Comité de la sécurité nationale. En face, les responsables du Mouvement démocratique orange (ODM), l’un des principaux partis politiques kenyans, avec William Ruto, Henry Kiprono Kosgey, l’actuel ministre de l’Industrialisation et le journaliste d’une radio locale – Kass FM – Joshua Arap Sang. Les trois hommes sont poursuivis pour avoir planifié les violences dans la vallée du Rift.

Le procureur met en garde les suspects

Pour l’instant, le procureur a demandé aux juges d’émettre des citations à comparaître et non des mandats d’arrêt. Luis Moreno Ocampo a cependant prévenu les suspects, lors d’une conférence de presse organisée mercredi 15 décembre à la Cour, que s’ils devaient interférer dans le cours de la justice, ils seraient immédiatement arrêtés. Pour les suspects, l’opportunité de comparaître librement peut, pour quelques temps encore, leur éviter d’attendre le début de leur procès dans les cellules de la Cour internationale à La Haye. Un procès qui ne commencera pas avant plusieurs mois.

Le président et le Premier ministre épargnés

S’il vise les deux camps qui avaient incité aux violences - elles avaient fait 1 100 morts et 600 000 déplacés - le procureur a affirmé ne pas avoir trouvé de preuves impliquant les deux responsables du pays, le président Mwai Kibaki et son Premier ministre, Raila Odinga. Luis Moreno Ocampo avait décidé d’ouvrir une enquête après l’échec du gouvernement à mettre sur pied un tribunal spécial chargé de poursuivre les auteurs des violences, comme le souhaitait alors le médiateur du conflit, Kofi Annan. Mais mardi, 24h avant les conclusions du procureur, le gouvernement a remis le projet sur la table. Une manière de se prémunir, le cas échéant, contre les initiatives du procureur. Car la Cour pénale internationale ne peut conduire des procès que si les Etats n’ont pas la capacité ou la volonté de poursuivre les auteurs de crimes de masse devant leurs propres tribunaux.

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