Les clubs européens se bousculent depuis plusieurs mois déjà pour courtiser Diafra Sakho, mais l’entreprise de séduction s’est forcément intensifier cet été, après que le troisième meilleur buteur de Ligue 2 (20 buts) a été élu meilleur joueur du championnat pour la saison 2013-2014 avec le FC Metz. Parmi les prétendants évoqués, quelques noms ronflants : Marseille, Lille, Lyon, Newcastle, Liverpool ou le Borussia Dortmund. C’est finalement West Ham, le 13eme de la dernière saison de Premier League, qui a décroché le gros lot, non sans quelques soubresauts. Alors que Metz et West Ham étaient initialement tombés d’accord sur un transfert définitif, le club anglais a ensuite changé d’avis, préférant un prêt, et provoquant le retour de l’attaquant en Lorraine. Quelques jours plus tard, il signait finalement pour cinq ans chez les Hammers. Mais Diafra Sakho a l’habitude de faire des détours lorsqu’il avance vers le succès.
Né en 1989, le Sénégalais a grandi entre Ziguinchor, en Casamance, et la Guinée-Bissau toute proche. Suite au coup d’Etat bissau-guinéen de 2003, la famille Sakho déménage et s’installe dans le quartier de la Médina à Dakar. Rien n’indique alors que Diafra, qui préfère le 200 et le 400 mètres, pourrait faire carrière dans le football. Son grand-père le destine d’ailleurs à une toute autre profession : celle de menuisier. Mais l’atelier dans lequel il est inscrit est juste en face d’un terrain de foot, et le chef de l’atelier en question encourage l’adolescent à aller s’entraîner. C’est lors d’une partie improvisée dans les rues de la capitale sénégalaise que son destin va basculer.
Des débuts compliqués en pro
Au bord du terrain, ce jour-là, un recruteur de Génération Foot le repère. Comme les grands clubs européens aujourd’hui, l’académie créée en 2000 par Mady Touré, et activement parrainée par le FC Metz depuis 2003, va longtemps lui faire la cour sans succès. « J’aimais bien le foot, mais bon, ce n’était pas trop mon domaine... Je n’avais pas envie d’aller là-bas dans le centre et partir de chez moi », explique-t-il à l’hebdomadaire France Football. Finalement convaincu, Sakho reste deux ans à Génération Foot avant qu’Olivier Perrin, formateur à Metz, ne le fasse venir en France. C’est son physique qui convainc Perrin. Sans pré-formation, celui qui évolue alors milieu de terrain doit encore se perfectionner sur les plans tactiques et techniques. Arrivé en Lorraine en 2007, il passera trois ans dans les équipes de jeunes des Grenats avant d’éclore en professionnel.
Les débuts avec l’équipe première du FC Metz ne sont pas de tout repos. « Diaf’ » marque peu, les supporters sont perplexes et le staff technique finit par le laisser sur le banc. Au début de la saison 2011-2012, il perd patience dans une interview : « Je ne comprends pas l’attitude de mes dirigeants. J’ai vu le président il y a quelques semaines pour revoir mon contrat. J’attends toujours… Dans ma tête, je ne suis pas bien. Les dirigeants ne respectent pas leur parole. Ce qu’ils m’ont dit n’a pas été suivi d’actes… » Exclu pour une semaine de l’équipe, il doit s’excuser à son retour. Hué par le public du stade Saint-Symphorien, Sakho reçoit aussi des menaces et des insultes racistes par la poste. En octobre, il est suspendu pour quatre matches par la commission de discipline de la LFP pour avoir contesté une décision arbitrale. Plus grave, son père décède au même moment. Au fond du gouffre, l’attaquant est prêté pour six mois à Boulogne, en National.
« Le physique qui va avec sa tête »
A son retour, tout a changé. Metz est descendu de Ligue 2 en National, mais son nouvel entraîneur, Albert Cartier, décide de donner une place centrale à Sakho dans son équipe. Un pari gagné puisque l’attaquant marque 19 buts et fait immédiatement remonter le club à l’échelon supérieur. Rebelote en 2013-2014 : Diafra Sakho marque 20 buts et le FC Metz ne s’attarde pas en L2, retrouvant l’élite après six ans d’absence. « Il a le physique qui va avec sa tête, juge Albert Cartier sur la chaîne sénégalaise TFM. Il a un physique pour faire des efforts, et il a le mental pour supporter ces efforts. » Sakho est maintenant considéré comme le digne successeur de ses compatriotes Jules Bocandé, Papiss Cissé, Mamadou Niang et Hervé Tum, ainsi que du Camerounais Patrick Mboma et du Togolais Emmanuel Adebayor, tous passés chez les Grenats.
Malgré les rumeurs qui le disaient approché par la Guinée-Bissau ou par le Togo, Diafra Sakho a connu ses premières sélections avec le Sénégal au printemps dernier. Il a même inscrit son premier but avec les Lions de la Téranga contre le Kosovo. Pour celui qui avait El-Hadji Diouf pour idole étant jeune, partir en Angleterre ressemblait à une évolution logique. Chez les Hammers, il succèdera à Demba Ba, passé brièvement dans le club avant de rejoindre Newcastle, et surtout au Malien Frédéric Kanouté, auteur de 33 buts en 92 matches au début des années 2000. Il devra surtout faire avec la concurrence de Kevin Nolan, meilleur buteur de West Ham lors des deux dernières saisons. Un défi de plus pour Diafra Sakho.