Mexique: les disparitions forcées, véritable fléau pour le pays

En cette journée internationale des victimes des disparitions forcées, l’ONU pointe du doigt ce problème aux dimensions terrifiantes au Mexique, depuis le début d'une guerre contre les cartels de la drogue. Selon le gouvernement, 32 000 personnes ont disparu dans le pays.

Avec notre correspondant à Mexico,

D'après les chiffres officiels du gouvernement mexicain, plus de 32 000 personnes ont disparu en dix ans. Le pays a même enregistré une augmentation importante en 2016 avec plus de 3 800 disparus, soit dix par jour. Depuis le début de cette année, la tendance est même à la hausse.

Mais ce qui est encore plus inquiétant, c’est que ces chiffres ne reflètent pas la réalité. En effet, on ne peut pas établir avec exactitude le nombre de disparus. Pour la simple et bonne raison que seuls deux cas sur dix seraient dénoncés par les familles de disparus, car elles redoutent l’absence de garanties de sécurité et de protection de la part des autorités qui sont trop souvent de mèche avec le crime organisé.

Les cartels principaux responsables

Ce sont souvent les narcotrafiquants qui enlèvent, assassinent et font disparaître leurs ennemis, souvent d’autres cartels. Mais ce n’est pas tout. Les migrants centraméricains sont fréquemment la proie des trafiquants de drogue qui les séquestrent pour les racketter ou les obliger à travailler pour eux. Ils les exécutent et les font disparaître en cas de refus.

Il y a aussi un phénomène croissant auquel on assiste depuis quelques années : celui de la disparition de jeunes femmes, ou même de très jeunes filles, qui sont enlevées. Elles sont probablement victimes de la traite des personnes ou de réseaux pédophiles. Leurs traces sont totalement perdues, sans savoir si elles sont mortes ou vivantes.

L’Etat aussi impliqué

L'implication d'agents de l’Etat (fonctionnaires, policiers ou membre de l’armée) dans ces disparitions a elle aussi été prouvée. Ils peuvent en être les auteurs, ou aider ou protéger les membres du crime organisé qui parviennent à infiltrer les institutions publiques facilement corruptibles.

Dans l’Etat de Nuevo León, au nord-est du pays, qui compte le plus grand nombre de disparus, 47 % des disparitions ont ainsi été réalisées par des agents de l’Etat, selon une étude récente. Ces disparitions forcées sont donc, pour la plupart, restées impunies.

Autre exemple emblématique de disparition forcée au Mexique : celle des 43 étudiants d’Ayotzinapa en septembre 2014. Ils ont été enlevés par des policiers municipaux et remis à des narcotrafiquants qui les ont fait disparaître. En trois ans, personne n’a retrouvé la trace de ces jeunes.

Une loi sur la disparition forcée attendue

Le gouvernement, lui, se dit dépassé par le problème. De plus, il n’existe toujours pas de législation. Depuis deux ans, le Parlement essaie en vain d’adopter une loi sur la disparition forcée et la disparition commise par des particuliers. Si le Sénat l’a déjà approuvée, la Chambre des députés, elle, traîne les pieds. Pourtant, de l’avis de tous, son adoption est urgente. Elle doit permettre de prévenir et sanctionner ce délit en prévoyant une peine allant jusqu’à 90 ans de prison. Elle doit aussi permettre de dédommager les victimes et leurs familles, de créer un registre des fosses clandestines, une banque nationale d’ADN et un Mécanisme national de recherche des disparus.

Ces recherches sont pour le moment faites par les parents qui fouillent désespérément les centaines de fosses clandestines du le pays dans l’espoir d’y retrouver le corps ou des restes de leur proche disparu.

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