Une plateforme pour signaler les cas de harcèlement sexuel au Liban

S’inspirant d’une expérience de l'organisation « Harass Map », en Egypte, où de nombreux cas d'agression sexuelle ont été enregistrés pendant les manifestations place Tahrir, trois jeunes femmes libanaises ont lancé une plateforme pour signaler et dénoncer ce type d’abus.

De notre correspondant à Beyrouth,

La plateforme Harass Tracker est composée d’une carte interactive détaillée de Beyrouth et de ses banlieues. Pour signaler une agression, il suffit de remplir un formulaire disponible au bas de la page d’accueil. Les questions sont simples : la victime est-elle une femme ou un homme ? Quel est le sexe de l’agresseur ? Où s’est déroulé le harcèlement ? Existe-t-il un lien entre la victime et l’agresseur ? Une case, facultative, permet une description de l’incident. Lorsque les renseignements sont complétés et validés, le cas est signalé sur la carte. Il suffit alors de cliquer sur un curseur bleu sur la carte pour obtenir toutes les informations. Depuis la mise en ligne de la plateforme, fin février, une quarantaine d’incidents ont déjà été répertoriés.

Dénoncer le harcèlement et mobiliser l'opinion

Le site propose une définition précise du harcèlement et une dénonciation des idées reçues. Nay al-Rahi, co-fondatrice du projet, a expliqué à RFI que de nombreuses personnes sont exposées à des agressions sexuelles mais n’en font pas mention, car elles pensent que seuls le viol ou le contact physique entrent dans cette catégorie.
Une autre fenêtre contient les noms et les coordonnées d’une dizaine de d’associations et d’ONG actives dans le domaine de la prise en charge et de la défense des victimes des agressions sexuelles. Enfin, le site propose un état des lieux juridique de ce que prévoit la loi libanaise en cas de harcèlement ou d’agression sexuelle.

Géolocalisation des agressions

Au-delà de la signalisation quotidienne des agressions, les fondatrices de ce projet veulent sensibiliser l’opinion publique sur l’existence du harcèlement dans la sphère publique, et faire en sorte qu’il soit banni de la culture libanaise. La clé réside, selon les fondatrices de la plateforme Harass Tracker dans la responsabilisation de tous face à ce mauvais traitement. Cette action à long terme doit aboutir à un changement des mentalités et des comportements. Le but ultime est de convaincre les autorités d’élaborer des lois modernes et d’amender les textes existant afin de les mettre à niveau.

Beyrouth, extension prévue aux autres villes libanaises

« Entre-temps, un tas d’autres démarches peuvent être prises après l’analyse des données collectées par le site », ajoute Nay el-Rahi. Parmi ces mesures, l’éclairage des rues ou le renforcement de la présence policière dans les zones sensibles. Les trois premiers mois, la plateforme sera dédiée à Beyrouth et ses proches banlieues. Si l'expérience s'avère concluante, le site élargira son action au Liban tout entier, où plusieurs centaines de cas d'agression sexuelle sont enregistrés chaque année, selon les associations de défense des femmes.

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