De notre correspondant à Pékin,
On connaissait « l’arroseur arrosé », là c’est « le sauveteur à sauver ». Pour ceux qui n’ont pas suivi toute la saga du brise-glace chinois, rappelons que le Xue Long, le Dragon des neiges, est d'abord intervenu pour débloquer le navire russe l’Akademik Shokalskyi, la semaine dernière. Des images impressionnantes ont tourné sur les télévisions chinoises, avec l’hélicoptère embarqué sur le brise-glace chinois venu évacuer 52 touristes et scientifiques bloqués depuis Noël à bord du navire russe. Avec évidemment les remerciements du commandant russe applaudis par les internautes.
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Mais depuis vendredi, le Dragon des neiges est à son tour bloqué par les glaces. Ce qui évidemment prête moins à sourire. Le président chinois Xi Jinping a demandé en personne à ce que tout soit mis en œuvre pour débloquer le navire, tandis que les réactions sur le réseau social sina weibo restent pour le moins glaciales ce lundi matin.
« Où sont les Chengguan ? »
« Après avoir joué les Leifeng (ce héros de la propagande communiste), on se retrouve dans le rôle du 'Titanic' », écrit ainsi Xiao Moqiuhai, un internaute. Le navire chinois est cerné par une couche de glace épaisse de quatre mètres par endroit, à une vingtaine de kilomètres des eaux libres. Il y a surtout ce gros iceberg à la dérive, long d'un kilomètre, qui rend les tentatives de désengagement périlleuses.
« Où sont les Chengguan ?, demande donc un autre weibonaute, R8Da Ke. Le pays et le peuple ont besoin de vous pour briser les icebergs ! » Les Chengguan ce sont les policiers municipaux en Chine, des agents en uniformes très décriés notamment parce qu’ils assistent aux opérations d’expulsions et de démolitions dans les villes et les campagnes chinoises.
Mais les « démolisseurs » ici, en l’occurrence, ce sont des Américains : « Il faut remercier l’Amérique impérialiste », lit-on sur le compte de l’écrivain Qing Nianzuojiachuxiaobai par exemple.
Pas d'appel à l'aide des Chinois
C'est en effet un navire américain qui est en route pour délivrer les Russes et les Chinois. Le Polar Star des garde-côtes américains a accepté une demande australienne d’assistance au navire russe immobilisé à une centaine de kilomètres à l’est de la base française Dumont d’Urville. Il devrait aussi aider les Chinois à sortir de la Commonwealth Bay où sont piégés les deux bateaux.
Que les choses soient claires : le Dragon des neiges n’a pour l’instant pas demandé à être secouru. Depuis hier soir, des photos circulent sur le net chinois montrant que tout est normal à bord. On voit l’équipage à la cantine, en train de jouer au go, ou de taper dans un sac de boxe. Il y a des vivres mais on signale quand même un manque d’eau potable.
Ce navire devait au départ aller installer la quatrième station scientifique chinoise en Antarctique. D’où les critiques d’ailleurs de certains scientifiques qui trouve que cette histoire de sauvetage, c’est aussi jeter de l’argent par les hublots.
Des précédents pour le Xue Long
S’il était très généreux de la part du bateau chinois de vouloir sauver l’équipage russe, le Xue Long savait aussi qu'en cas de météo mauvaise, il se retrouverait en difficulté. C’est un cargo de 160 m, racheté à l’Ukraine en 1993. Il a été transformé depuis en brise-glace, mais sa capacité à fendre la banquise est limitée lorsque la glace dépasse les 2m50. Or, actuellement, l'épaisseur glacière est de quatre mètres.
En 2008, le Dragon des neiges s’était déjà retrouvé prisonnier du continent blanc, le temps d'une journée et il était parvenu à se dégager seul, rapporte ce matin un journaliste scientifique du Quotidien du Peuple. Le navire américain Polar Star, quant à lui, devrait mettre une semaine à atteindre la Commonwealth Bay.