« Tu ne me donnes pas d’ordres, c’est moi qui te les donne. Ne me tutoie pas. Tu va respecter ton supérieur maintenant, salaud ! » hurle, manifestement ivre, le conseiller municipal de la ville de Ixtapaluca, Francisco Javier Romo, sur un officier de police. La scène est filmée par ce dernier, début juin, puis diffusée sur Youtube ; elle atteint rapidement plusieurs milliers de vues. Le dérapage est repris sur Twitter, sous le hashtag #gentlemandeixtapaluca, où les internautes lâchent des commentaires comme des bombes, dénonçant l'ivresse de pouvoir du politicien.
Mais ce « Gentleman » de Ixtapaluca n'est que le dernier d'une longue liste de personnalités politiques dont le véritable visage a pu être mis en lumière grâce aux technologies et au partage sur Internet. Utilisés par 35 millions de Mexicains, les réseaux sociaux apparaîssent pour nombre d'entre eux comme un outil démocratique, permettant à la société civile de pointer du doigt les abus et les styles de vie ostentatoires de certains élus.
« Je suis ta représentante ! Je suis l'autorité »
Cette nouvelle forme de pression a même joué directement sur le limogeage d'un procureur. Le 26 avril, Humberto Benitez, à la tête de la plus haute instance juridique chargée de la consommation, se hâte de fermer un restaurant de la capitale après que sa fille Andrea se plaigne de ne pas avoir eu la table qu'elle voulait. Le bruit se répand et les internautes, qui la surnomment depuis « Lady Profeco », du nom du bureau de son père, crient au scandale. Quelques jours plus tard, le président méxicain, Enrique Peña Nieto, se charge d'écarter le procureur.
Toujours dans la famille des « Ladies », c'est au tour d'une sénatrice de se trouver au centre des moquerie et des parodies du web. Arrivée trop tard à l'aéroport de Cancun, Luz Maria Beristain s'acharne sur une employée du comptoir de la compagnie VivaAerobus qui ne lui permet pas d'aborder le vol. « Je suis ta représentante! Je suis l'autorité! », lui hurle la sénatrice indignée, dans une vidéo de cinq minutes.
Une classe politique mise à nue
Outre les complexes de supériorité, plusieurs personnalités politiques sont épinglées pour avoir exhibé leur mode de vie trop bling-bling aux yeux des Mexicains, pour qui le salaire moyen tourne autour de 300 euros. L'exemple le plus flagrant est Andrés Garnier. Cet ex-gouverneur de l'état de Tabasco se vante par téléphone des centaines de vêtements de marque qu'il a distribué un peu partout dans ses nombreuses résidences.
La classe politique mexicaine, en grande partie gangrénée par la corruption et le trafic d'influence, est ainsi placée sous la loupe des réseaux sociaux. Un enjeu qui a marqué les toutes récentes élections municipales : le maire de la ville Benito Juarez, surnommé « Ricky Ricalde », a revu son score à la baisse après la diffusion d'une vidéo le montrant en train de recevoir une enveloppe de billets qu'il affirme provenir « des impôts ».