De notre envoyé spécial, Thomas de Saint-Leger,
Du vert, du jaune, du bleu. Avec un tel maillot, difficile de passer inaperçu sur les routes de la Tropicale Amissa Bongo 2018. Un an après un forfait très commenté, les « Panthères » du vélo sont de retour sur leur tour national.
Taxés d’antipatriotes par la ministre des Sports de l’époque, Nicole Assélé, les cyclistes du pays ont retrouvé leur place dans le cœur des Gabonais. A Kango, à Ndendé, à Fougamou, les coéquipiers de Leris Moukagni sont les stars de l’applaudimètre, loin devant les autres équipes africaines, loin aussi devant les formations européennes professionnelles.
« On leur pardonne tout, on leur fait confiance », explique John, un habitant de Fougamou. « C’est notre pays, on est là pour les soutenir. Cette course a lieu chez nous, on voudrait qu’ils donnent encore plus, on veut en voir un en jaune ! » clame ce quadragénaire enthousiaste.
Un Gabonais en jaune, c’est mal parti : pour le moment, il faut descendre loin dans les classements pour retrouver une trace de « Panthères », tout aussi invisibles dans les échappées. Mais l’essentiel est ailleurs pour tout le monde, y compris les coureurs. « Ça fait du bien de revenir », lâche le champion national 2013, Cédric Tchouta. « Nous sommes heureux et surpris. On avait un peu peur de l’accueil après l’échec de l’an dernier. Mais le public n’a pas changé, il ne nous a pas abandonné, il continue de nous soutenir, alors il faut donner le maximum. » Et tant pis si c’est un minimum. Comprendre : finir la course.
Ousseini Chaibou à la rescousse
A leur décharge, Cédric Tchouta et ses coéquipiers ne sont bien sûr pas professionnels. Ils attaquent en plus ce rendez-vous sans aucune préparation spécifique, la faute à une organisation compliquée. La fédération gabonaise de cyclisme sort à peine d’une crise de gouvernance longue et pénible.
Pour rattraper le temps perdu, les instances ont parié sur un homme : Ousseini Chaibou. Entraineur historique des « Panthères » du vélo au début des années 2000, il vient d’être rappelé à leur chevet.
La présence de cet ancien coureur amateur rassure ses « gars » comme il les appelle avec affection. Mais l’homme est discret, alors il préfère s’effacer : « Le gouvernement a fait en sorte que les conditions soient réunies, et c’est le cas. Le nouveau ministre des Sports (Mathias Otounga Ossibadjouo) nous a reçu 2 jours avant le départ, il a su nous motiver en nous disant qu’il fallait sauver l’image du pays, le représenter valablement. Et c’est ce que nous sommes en train de faire ».
Les « conditions », ce sont en fait des primes remises aux coureurs. De quoi clore la polémique pour Ousseini Chaibou « Tout est rentré dans l’ordre, les coureurs sont dopés moralement. ».
De quoi envisager un avenir un peu plus reluisant pour le cyclisme gabonais ? Réponse tranchée de l’entraineur national : « Oui ! Si le politique suit, si nous sommes accompagnés sur le plan financier, sans aucun doute. Les gars ne sont pas minables, ils sont capables de faire de très bons résultats dès la prochaine édition de la Tropicale. »
En attendant, il faudra s’entrainer, disputer des courses. Ça tombe bien, Ousseini Chaibou a prévu d’emmener ses troupes aux Championnats d’Afrique au Rwanda, le mois prochain, puis au Tour du Cameroun et au Tour du Sénégal, en mars. Si les conditions sont réunies….