Sport et cocaïne, une histoire de drogue qui dure

Les arrestations des rugbymen Ali Williams et James O’Connor pour détention de cocaïne samedi 25 février, relancent une nouvelle fois les interrogations sur l’utilisation de cette drogue chez les sportifs. En dehors de l’usage festif, la cocaïne permet de mieux supporter la douleur et les entraînements intenses.

Deux joueurs stars du championnat de France de rugby ont été arrêtés en possession de 2,4 grammes de cocaïne. Une nouvelle affaire qui montre que dans le rugby et dans le sport en général, la prise de cocaïne est très répandue.

La cocaïne destinée à supporter les lourdes charges d'entraînement

« Ce n'est que mon avis, mais j'ai l'impression que dans certains clubs et auprès de beaucoup de joueurs, "la coke" s'est un peu invitée dans le milieu festif. On a eu l'étape alcool, là on est à une autre étape. On ne peut pas favoriser ça. Il faut que ça s'arrête », a réagi Mourad Boudjellal, président du Racing club de Toulon où l’Australien James O'Connor évolue. Le joueur a été mis à pied à titre conservatoire jusqu'à un prochain entretien qui aura lieu sous huit jours, avec son président.

Christian Bagate, ancien médecin chargé jusqu'en décembre 2016 de la lutte contre le dopage à la Fédération française de rugby (FFR), avait déjà alerté sur cette pratique dans le milieu du ballon ovale. « Quand vous avez mal, il peut vous arriver de prendre des produits codéinés contre la douleur. Là c'est la même chose, c'est un dérivé. Sauf que la puissance est plus grande et que la cocaïne a une propriété stimulante, et non inhibitrice », expliquait-il. Christian Bagate évoque le « cocktail corticoïdes-cocaïne du lundi-mardi-mercredi » destiné à supporter les lourdes charges d'entraînement du début de semaine tout en récupérant du match du week-end.

Un produit difficile à détecter en-dehors des compétitions sportives

« Il y a une vraie porosité entre les milieux festifs et sportifs. La prise de contact avec la cocaïne se fait certainement souvent dans le premier », estime Laurent Bénézech, ancien pilier international, auteur en 2014 d'un ouvrage dénonçant le dopage dans son sport.

Amaury Leveaux, champion olympique 2012 du 4x100m, qui a publié Sexe, drogue et natation : un nageur brise l'omerta, en 2015, avait révélé l’attrait plus ou moins prononcé des nageurs français. A l’époque, l’ouvrage avait fait grand bruit. « La cocaïne stimule le système nerveux central, permet de ne pas avoir faim, de ne pas être fatigué, de lutter contre la difficulté de l'effort. Elle donne au sportif le sentiment d'être invincible, d'être Superman, la sensation que rien ne lui résiste », écrivait-il.

Inscrite depuis longtemps sur la liste des produits interdits par le CIO depuis 1971, la cocaïne est en outre difficile à détecter en dehors des compétitions sportives. Les traces dans les urines disparaissent rapidement, au bout de trois jours environ.

Diego Maradona ou encore Marco Pantani adeptes de la poudre blanche

Des affaires très médiatisées ont permis au grand public de se rendre compte que ce stimulant est en vogue depuis un moment. En 1978, le nageur américain Mark Foreman est privé de compétition deux années pour avoir pris cette poudre blanche. En 1991, Diego Maradona est arrêté par la police italienne pour usage de cocaïne. Le footballeur argentin est suspendu quinze mois et ne rejouera plus avec Naples. Toujours en Italie, le cycliste Marco Pantani est retrouvé mort le 14 février 2004 dans sa chambre d’hôtel à Rimini. L'autopsie révèle que le décès a été causé par une overdose de cocaïne.

« Le sportif professionnel est un "bon client" pour la cocaïne, analysait dans les colonnes du Monde William Lowenstein, directeur de l'Institut Baron Maurice de Rothschild pour la recherche et le traitement des addictions. Cette substance permet l'illusion d'être un champion : elle repousse la fatigue, mais aussi le doute, la peur de l'autre, du présent et de l'avenir. Elle permet de "bouffer de l'autre" et d'assumer une position mégalomaniaque, de champion ».

Selon Xavier Bigard, conseiller scientifique de l'Agence française de lutte contre le dopage, la cocaïne représente un danger sanitaire pour les sportifs, vingt fois plus souvent victimes de mort subite que les consommateurs non sportifs.

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