Tour de France: des caméras thermiques pour débusquer les moteurs

Les premières rumeurs autour de l’utilisation de vélos motorisés chez les professionnels datent du début des années 2000. Sur le Tour de France, l’Union cycliste internationale et le ministère des Sports ont décidé de faire la chasse aux tricheurs avec un système de caméra thermique.

De notre envoyé spécial,

De tout temps, les coureurs du peloton ont tenté de rendre leur travail moins pénible. Jusqu’à mettre un moteur dans le vélo ? Après les grandes années de la substance dopante EPO, il fallait trouver une autre parade. Celle-ci, grosse comme une maison, pourrait anéantir la crédibilité du cyclisme.

La promesse d'une lutte sans merci

Si ce fut longtemps une rumeur, c’est désormais avéré. En 2010, la démonstration de force du Suisse Fabian Cancellara dans la campagne des classiques avait suscité pas mal de questions. La domination de Christopher Froome dans la montée vers La Pierre-Saint-Martin (Pyrénées) l'an dernier sur le Tour avait provoqué toutes sortes de commentaires suspicieux.

Le « dopage mécanique » est devenu une réalité après la découverte d’un moteur dans le vélo d’une féminine, la jeune spécialiste belge du cylo-cross Femke Van den Driessche, lors des derniers mondiaux cet hiver. L'arbre qui cache la forêt ?

Aujourd’hui, Brian Cookson, le président de l’Union cycliste internationale (UCI), promet une lutte sans merci contre la fraude technologique pendant ce Tour de France 2016. Des caméras thermiques permettant de détecter la chaleur d’un éventuel moteur dissimulé dans le cadre d'un vélo vont être utilisées. L’UCI a ainsi décidé de renforcer ses contrôles sur les vélos avant et après la course, mais aussi « pendant la course si des changements de vélo ont lieu », affirme Brian Cookson. « Nous ne testerons pas que les vélos avec lesquels les coureurs commenceront l’étape. Nous ferons aussi des tests sur les vélos transportés par des voitures, mais aussi dans les camions des équipes », précise-t-il. Il devrait y avoir plus de 3000 tests.

L’UCI a été très critiquée par certaines équipes qui reprochaient un manque d'ambition de la part de l'instance internationale pour faire la chasse aux tricheurs. « Nous sommes heureux de collaborer avec le gouvernement français et l’organisateur du Tour », nous dit Brian Cookson qui refuse toutefois d’entrer dans les détails.

Ce n’est pas généralisé comme l'EPO en 1998

Ces caméras thermiques ont été mises au point par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), à la demande du gouvernement français. L’une d’elles a été utilisée à titre expérimental pendant les Championnats de France en juin, révèle David Lappartient, le président de la Fédération française de cyclisme.

Dans l’ensemble, les coureurs du peloton n’ont pas eu de mal à commenter ce nouveau dispositif. « Je ne dis pas que ça n’a jamais existé, mais c’est une ou deux personnes. Ce n’est pas généralisé comme cela a pu être le cas en 1998 avec l’EPO », raconte par exemple le coureur français Romain Bardet. Pour le directeur du Tour de France, Christian Prudhomme, « il faudrait être fou » pour contourner ce système mis au point par des ingénieurs « de haut vol ». Sauf qu'aujourd'hui, technologiquement, tout est possible pour les équipes qui participent au Tour. « Il y a de gros doutes et j’espère que tout le monde est conscient que ce serait une sacré dérive », commente l’ancien coureur français Andy Flickinger.

Pour contrecarrer cette éventuelle dérive, les caméras pourraient être placées sur des motos ou dans des véhicules. Mais toutes les personnes sollicitées pour répondre à cette question ont bien évidemment refusé d’en dire plus. On sait juste que l'organisateur de la course a mis à disposition de l'UCI un motard et son véhicule et que le ministère des Sports dispose aussi d'une caméra. Il y a aussi ces fameuses tablettes avec un système à résonnance magnétique utilisées chaque jour par l'UCI au départ et à l'arrivée des étapes. Va-t-on désormais ranger le cyclisme dans la rubrique des sports mécaniques ?

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