« Le Qatar doit en faire plus » pour assurer des conditions de travail décentes sur les chantiers du Mondial 2022. Encore une fois, Joseph Blatter, le patron de la Fifa, est revenu sur cet épineux problème à l'issue d'une entrevue avec l'émir Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, dimanche 15 mars à Doha.
Encore un effort
« Comme certaines organisations de défense des droits de l'homme l'ont noté, des progrès ont déjà été accomplis, en particulier avec les normes introduites sur les chantiers de construction, mais le Qatar doit en faire plus pour assurer des conditions de travail équitables pour tous. Cela ne sera possible que grâce à l'effort collectif de toutes les parties prenantes, des entreprises de construction aux autorités », explique Blatter.
Les conditions de travail sur les chantiers du Mondial au Qatar sont régulièrement dénoncées par des organisations internationales de défense des droits de l'homme. Il y a un peu plus d’un an, la Fifa avait dû « sommer » le Qatar de prendre des mesures concrètes. En mai 2014, l'émirat avait promis d'abolir la « kafala », le système de parrainage local qui fait des salariés des quasi-propriétés de leur employeur, et son remplacement par « un système de contrat de travail ». Pour le moment, cette promesse est restée lettre morte.
57 centimes d'euro de l'heure
« Il est clair qu'il y a des problèmes et des choses à régler » sur les chantiers au Qatar, avait insisté Jérôme Valcke, le numéro 2 de la Fifa, lors d'une conférence de presse le 25 février dernier. Début février, le Qatar avait annoncé qu'il allait introduire un système de paiement des salaires grâce auquel les ouvriers seraient payés au moins une fois par mois. Une revendication de longue date de la part d'organisations de défense des droits de l'homme comme Amnesty International ou Human Rights Watch. Les ouvriers travaillant à la construction du stade d'Al-Wakrah au Qatar, l'une des enceintes destinées à accueillir des matches du Mondial 2022, seraient payés 57 centimes d'euro de l'heure selon une récente enquête du quotidien britannique The Guardian.
Depuis la publication d'un dossier de The Guardian en septembre 2013 sur les conditions de travail sur les chantiers dans l'émirat, le sujet a fait couler beaucoup d'encre. Le journal britannique avait parlé « d'exploitation » et d'abus « s'apparentant à de l'esclavage moderne ». The Guardian affirme qu’entre juin et début août 2013, 44 ouvriers népalais seraient morts sur des chantiers de l'émirat.
De plus en plus d'immigrés
Tout cela n’empêche pas le Qatar de continuer sa marche en avant dans la construction d’infrastructures en tout genre. Le Premier ministre du Qatar a affirmé ce dimanche que son pays allait investir 200 milliards de dollars. « Nous réaffirmons notre engagement à investir dans (des projets) d'infrastructure, de santé et d'éducation », a indiqué cheikh Abdallah ben Nasser al-Thani, dont le gouvernement finance actuellement la réalisation du métro de Doha et la construction d'un nouveau port. Le Qatar comptera deux fois plus de travailleurs migrants dans les prochaines années, a indiqué mardi un haut responsable qatarien.
Lors d'une conférence économique intitulée « Qatar Projects » à Doha, on apprend que le nombre de travailleurs migrants atteindrait « 2,5 millions d'ici trois à cinq ans ». La population de migrants est actuellement estimée à entre 700 000 et un million. Le Qatar compte au total 2,3 millions d'habitants, selon des chiffres officiels.