Le comité exécutif de la FIFA s'attelait ce vendredi au dossier chaud de la Coupe du monde 2022 de football au Qatar. Un sujet devenu bouillant après les accusations d'esclavagisme moderne brandies par des syndicats de travailleurs. Prévue dans neuf ans, cette Coupe du monde ne cesse de faire des remous depuis son attribution.
« La Fifa ne peut pas faire d'ingérence »
Le quotidien britannique The Guardian a récemment révélé la mort de dizaines de travailleurs népalais ces dernières semaines sur les chantiers du Qatar. Le journal a affirmé que 44 travailleurs népalais au Qatar sont morts entre le 4 juin et le 8 août, en citant des documents obtenus par l'ambassade de leur pays à Doha.
Aujourd’hui, Joseph Blatter, le président de la Fédération internationale de football (FIFA), vient de déclarer après un comité exécutif qui s'est notamment penché sur les accusations d'esclavagisme portées contre le Qatar : « La FIFA ne peut pas faire d'ingérence dans le droit du travail d'un pays mais ne peut l'ignorer. »
La FIFA, par l’intermédiaire de son directeur de la communication, avait déjà réagi jeudi aux informations du quotidien britannique. « Même si ces morts ne sont pas liés aux stades de la FIFA, parce que nous n'avons pas commencé à travailler sur les stades, chaque mort est un mort de trop », a déclaré jeudi 3 octobre, Walter de Gregorio, réitérant l'inquiétude de la FIFA.
« Toucher deux mots sur les conditions de travail dans ce pays »
Interrogé sur les révélations du Guardian, « Sepp » Blatter a répondu ce vendredi : « Cela nous touche, mais ce n'est pas de la responsabilité de la FIFA. La responsabilité incombe aux lois du travail mais aussi aux entreprises qui travaillent là-bas. Il y a beaucoup d'entreprises européennes. »Le président a annoncé qu’il ferait prochainement« une visite de courtoisie pour confirmer que la Coupe du monde se jouera bien au Qatar ». Il en profitera pour « toucher deux mots sur les conditions de travail dans ce pays ».
Sous le feu des critiques, le gouvernement du Qatar a demandé à un cabinet d’avocats de se pencher sur la question et d’établir « un rapport sur leur véracité ».
Dans un entretien accordé à l’Agence France-Presse, James Lynch, chercheur d’Amnesty International sur les travailleurs migrants dans le Golfe, estime que « dans le secteur de la construction, les recherches font apparaître que l’exploitation est une pratique banalisée ».
« Quand un salarié arrive, on lui prend son passeport »
Autre son de cloche, celui de Gilles Letort de la Fédération CGT des salariés de la construction au micro de RFI. Il fera partie d’une vingtaine de syndicalistes européens, mais aussi pakistanais, indiens et népalais, à se rendre au Qatar lundi prochain pour constater les conditions de travail des migrants dans l'Émirat. Mais il n’est pas certain que les autorités locales leur permettront-ils de circuler et de choisir librement leurs interlocuteurs. « Quand un salarié arrive, on lui prend son passeport sous prétexte que les conditions de sécurité ne lui permettent de le garder. Du coup, il ne peut plus sortir. D’autre part, les salariés travaillent dans des conditions abominables », avance Gilles Letort.
Prévue dans neuf ans, la Coupe du monde au Qatar fait déjà beaucoup parler. Entre l'enquête du journal britannique et les soupçons de corruptions lors de son attribution, l’événement sportif le plus médiatique au monde n’a pas fini de faire des vagues.