Cinquante pays, des représentants de l’UEFA, de la FIFA, d'Interpol, mais aussi des juristes, des joueurs, des grandes sociétés internationales de paris sportifs... Tous ont décidé de se retrouver ensemble, une première, pour discuter concrètement : comment endiguer la dérive des matches truqués dans le football ? Le phénomène est devenu planétaire, incontrôlable et menace de saper les fondations de ce « beau jeu » comme il est indiqué dès l’intitulé de la conférence de Rome tenue ces jeudi et vendredi 17 et 18 janvier.
Un immense chantier
L’UEFA et la FIFA ont mis de très grands moyens pour surveiller les matches qui se déroulent sous leur tutelle. Il s’agit d’un système de contrôle baptisé "Early warning system", qui permet de donner l’alerte en cas d'anomalies dans les paris sur un match. A elle seule, l'UEFA surveille par ce biais 32 000 matches par an.
Or, c’est loin d’être suffisant. Car dans un match, on ne parie pas que sur les buts marqués. Comme l’a expliqué Antonio Manganelli, chef de la police italienne : « on ne se trouve pas à gérer seulement les paris sur le résultat, mais sur tous les petits détails du football : qui aura le premier corner ? qui aura la première touche ? »
Sans l’aide des Etats, point de salut
D’où la nécessité absolue d’appeler à la rescousse le système répressif des Etats. Cependant, ceux-ci ont besoin d’être sensibilisés, car « le crime » des matches truqués dans le football ne leur paraît aussi sérieux que les trafics de drogue, d’armes, d’êtres humains, etc. « Nous devons convaincre les autorités », a insisté le secrétaire général de l'UEFA, Gianni Infantino. « Quand un procureur me dit : "j'ai plus important à faire, la prostitution, la drogue, le trafic d'armes, e ne peux pas seulement m'occuper d'un match de 3e division acheté", je lui explique que ce n'est peut-être qu'un petit investissement d'une organisation criminelle, mais qu'il est ensuite réinjecté dans la prostitution ou la drogue. »
En effet , en Italie, les crimes sportifs sont jugés devant un tribunal civil, mais ce n’est pas le cas partout ailleurs. D’où la nécessité impérieuse invoquée à la conférence de Rome que tous les pays se dotent d'une législation commune pour juger les crimes sportifs.
La nécessité de la coopération internationale
Mais la répression à l’échelle d’un pays, aussi tenace soit-elle, n’aboutira pas à des résultats tangibles si elle ne s’appuie pas sur une large coopération internationale. « C'est vrai que c'est très difficile de mener l'enquête (dans un seul pays) puisqu'on peut parier de n'importe où dans le monde », a ainsi reconnu le secrétaire général d'Interpol, Ronald Noble. L’organisateur présumé des matches truqués en Italie (le scandale du Calcioscommesse) a par exemple œuvré depuis Singapour, notamment Eng Tan Seet, arrêté en 2011.
« Les matches truqués, c’est un dragon à plusieurs têtes, que nous devons trancher par un effort international », a ainsi conclu le haut responsable d’Interpol. C’est pourquoi les participants à la conférence de Rome, la première du genre, ont décidé d’en organiser aussitôt une deuxième en février, qui aura lieu en Malaisie selon Interpol.