VIH et alimentation

Claire Hédon : Cette semaine, vous allez vous intéresser à la nutrition des personnes vivant avec le VIH. Pour démarrer, pouvez-vous nous rappeler le lien entre infection par le VIH et nutrition ?  

Stéphane Besançon, nutritionniste et directeur de l'ONG Santé Diabète :
Il est vrai, Claire, que l’on a plus l’habitude de faire le lien entre nutrition et diabète ou hypertension qu’entre nutrition et infection par le VIH. Pourtant, l’impact nutritionnel de l’infection est aussi très important. Pendant de nombreuses années, la préoccupation des patients et des professionnels de santé était centrée sur la prise en charge de la dénutrition liée à la maladie (qui se caractérise par des apports nutritionnels insuffisants en regard des dépenses énergétiques de l'organisme). Avec l’arrivée des traitements par trithérapie, la prévalence de la dénutrition a diminué. Par contre, en parallèle, de nouveaux troubles métaboliques ont fait leur apparition comme l’insulino-résistance favorisant la survenue de diabète ou encore les dyslipidémies, qui sont des anomalies qualitatives ou quantitatives d'une ou de plusieurs graisses présentent dans le sang, favorisant les pathologiques cardiovasculaires.

Claire Hédon : Pour commencer, comment se caractérise la dénutrition liée à l’infection par le VIH et comment est-elle prise en charge ?
 

La dénutrition est une complication majeure chez les personnes vivant avec le VIH, et notamment chez les enfants, la communauté scientifique parle d’ailleurs du « wasting syndrome » ou en français la cachexie. Ce syndrome associe une perte de poids de plus de 10% par rapport au poids de référence, une fatigue importante et / ou une diarrhée et / ou de la fièvre. Il est important de rappeler que pour parler de « wasting syndrome », ces paramètres doivent évoluer sur une durée minimum d’un mois indépendamment de toute infection secondaire associée au VIH.

Pour éviter la dénutrition, l’alimentation des patients doit être adaptée en suivant 3 recommandations :
•             Rehausser l’énergie apportée par les aliments de 10 à 20% ;
•             Enrichir les prises alimentaires en aliments riches en protéines ;
•             Varier l’alimentation en variant les types et goûts des aliments afin de limiter la lassitude et les dégouts alimentaires qui peuvent être provoqués par les médicaments. 

Claire Hédon : Est-ce que cette dénutrition ne représente pas un risque supplémentaire dans les pays en voies de développement ou la prévalence de la dénutrition est déjà élevée ?

En effet, Claire, dans les zones géographiques où la prévalence de la dénutrition est déjà importante, on constate souvent un phénomène double : d’une part, la malnutrition aggrave les conséquences de l’infection par le VIH ; et d’autre part,  l’infection par le VIH  aggrave fortement la situation globale de la dénutrition. Il est donc très important d’intégrer la prise en charge de cette forme de malnutrition, notamment chez les enfants, afin de  briser ce cercle vicieux.

Claire Hédon : qu’en est-il maintenant des troubles métaboliques chez les patients traités par trithérapie ?

On peut caractériser 2 troubles principaux : la lipodystrophie, qui est un trouble de répartition des graisses dans le corps des patients, et les anomalies au niveau des graisses sanguines comme le cholestérol et les triglycérides. Il est donc très important que nos auditeurs diagnostiqués et mis sous traitement pour une infection par VIH s’assurent que leur traitement, en plus des médicaments, inclus un bilan alimentaire permettant de corriger leurs habitudes alimentaires, ainsi que des conseils pour favoriser l’activité physique, lutter contre le tabagisme, l’hypertension artérielle. Ils permettront à la fois de prévenir le risque de survenue de diabète et de maladies cardiovasculaires.

Dans les deux cas, Claire, si nos auditeurs ont un doute sur leur situation ils doivent consulter les professionnels de santé qui les suivent afin de réaliser un diagnostic nutritionnel précis qui permettra d’identifier les mesures adéquates à prendre.

Pour poursuivre les échanges sur cette chronique rendez-vous sur :
Le compte Twitter de Stéphane Besançon
Le compte Facebook de l'ONG Santé Diabète
 

Partager :