Cette étude ANRS Visconti (l’ANRS étant l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites) est réalisée en France et est parue dans la revue scientifique Plos Pathogens. Elle confirme ce nouveau concept de « rémission fonctionnelle » dont on a parlé la semaine dernière chez un bébé américain. Mais l’intérêt de cette étude est double : d’abord elle est faite sur un nombre de personnes plus important : quatorze patients ; et deuxièmement elle se déroule sur une période plus étendue.
Ces patients ont tous été diagnostiqués au cours de leur primo-infection, c'est-à-dire dans les dix semaines après infection, et ont immédiatement bénéficié d’une thérapie antirétrovirale sur une période de trois ans avant d’arrêter toute prise d’antirétroviraux.
Contrôle plutôt que guérison
Depuis le début de l’épidémie, il y a trente ans, les traitements permettent de lutter contre le virus mais pas de l’éliminer. L’arrêt du traitement contre le sida conduit dans la plupart des cas à une remontée rapide du nombre de virus dans le sang, imposant la reprise des médicaments. C’est pour cela que jusqu’à maintenant, on ne parle pas de guérison.
Mais cette étude montre que des patients mis très précocement sous traitement n’en n’ont plus besoin ensuite. Cependant, dans ce cas, plutôt que de parler de guérison, les médecins préfèrent parler de contrôle du virus, de « rémission fonctionnelle ». Le virus n'a pas été totalement éradiqué mais sa présence est tellement faible que le système immunitaire de l'organisme peut le contrôler sans thérapie antivirale.
Une étude plus complète
Cette étude avait déjà été évoquée lors de la grande conférence sur le sida en juillet dernier à Washington, mais les résultats publiés dans Plos Pathogens montrent une diminution du nombre de cellules infectées circulant dans le sang chez ces patients qu’on pourrait appeler « contrôleurs après traitement ». Et cette diminution se poursuit, même après l’arrêt du traitement. En clair, ils éliminent progressivement le virus de leur corps et ils tolèrent l’infection.
Le traitement précoce a probablement limité l’extension des réservoirs viraux, ces endroits où le VIH se cache, et en conséquence a préservé les réponses du système immunitaire. Cette nouvelle publication montre que ce n’est pas anecdotique, l’étude est plus complète que ce qui a pu être dit auparavant. Mais seulement 10% des porteurs du VIH sida sont des contrôleurs après traitement.
Quelles vont être les suites de cette étude ?
Bien sûr il s’agit pour l’instant seulement d’une étude, les patients sous antirétroviraux ne doivent en aucun cas arrêter ces traitements contre le sida, mais ce type de recherche permet de mieux comprendre le VIH et d’espérer aboutir un jour à la guérison du sida.
En tous cas, ces résultats de l’étude ANRS Visconti et ceux observés chez le bébé américain auparavant plaident fortement en faveur d’une initiation précoce du traitement antirétroviral.
On cherche maintenant à comprendre pourquoi une fraction seulement des patients traités en primo-infection sont capables de contrôler leur infection après arrêt des médicaments. Une nouvelle étude va démarrer dans les prochains mois pour suivre une cohorte européenne de patients « contrôleurs après traitement ».