De notre correspondant à Beyrouth,
Le Hezbollah chiite, qui dispose de trois ministres au gouvernement, se veut le fer-de-lance de la lutte contre la corruption et sa première cible est l’ancien Premier ministre sunnite Fouad Siniora. La confrontation se déroule sur le terrain politique, devant la justice et sur les réseaux sociaux.
Le député Hassan Fadlallah, chargé par son parti, le Hezbollah, de la lutte contre la corruption, a accusé Fouad Siniora, sans le nommer, de mauvaise gestion des comptes publics alors qu’il dirigeait deux gouvernements entre 2005 et 2009. Onze milliards de dollars auraient été dépensés sans être consignés selon les règles dans les comptes de l’État, affirme le député.
Le procureur financier s’est alors saisi du dossier et a annoncé l’ouverture d’une enquête. L’affaire a emballé les internautes qui ont inondé la Toile de commentaires sous le hashtag #comptes_publics. Si certains appuient sans réserve la démarche du Hezbollah, d’autres y voient un règlement de compte politique contre une des personnalités qui lui est le plus hostile au Liban.
Contre-attaque
Fouad Siniora a contre-attaqué en accusant le Hezbollah de s’en prendre à l’héritage de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, dont le procès des présumés assassins, des membres du Hezbollah jugés par défaut devant un tribunal international à La Haye, en est à sa phase finale.
Vendredi 1er mars, Fouad Siniora a essayé de décrédibiliser l’initiative du Hezbollah en affirmant qu’elle vise plus à régler des comptes politiques qu’à combattre la corruption. Il a rejeté toutes les accusations portées contre lui, se défendant d’avoir dilapidé ou mal géré l’argent public.
Il a déclaré que la démarche du Hezbollah rappelle les campagnes d’intimidation menées il y a 20 ans par le pouvoir libanais alors allié de la Syrie contre ses adversaires. « Le vrai corrompu est celui qui a créé des mini-États, qui a paralysé les échéances constitutionnelles et qui prive le Trésor des recettes douanières », a-t-il dit en référence au Hezbollah.
Connotation confessionnelle
Quelques heures plus tard, le hashtag #voleur_et_demi, s’est répandu comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, accompagné de commentaires et de vives critiques contre l’ancien Premier ministre, accusé de tous les maux.
Parallèlement au déchainement des passions sur la Toile, la polémique s’est poursuivie sur le terrain politique. Hassan Fadlallah a riposté en affirmant que Fouad Siniora, qu’il n’avait jamais nommé, s’est lui-même placé dans le box des accusés.
Le député du Hezbollah a dénoncé les tentatives de l’ancien Premier ministre de donner à cette affaire une connotation confessionnelle, en laissant entendre que la campagne anti-corruption ne vise pas sa personne, mais la communauté sunnite à laquelle il appartient.
« Les protections communautaires ne le sauveront pas », a martelé le député. Les propos de Hassan Fadlallah ont été relayés en boucle et commentés sur les réseaux sociaux par des milliers d’internautes. Le hashtag #Siniora était le plus utilisé sur Twitter ce week-end.