Avec notre correspondant à San Francisco, Eric de Salve
La décision de la Cour internationale de justice permet aux deux camps de crier victoire. A Washington, Mike Pompeo y voit une défaite pour l'Iran. La plus haute juridiction des Nations unies a en effet rejeté la demande de Téhéran de suspendre plus largement les sanctions américaines.
« A juste titre, ces requêtes sont sans fondement », se satisfait le chef de la diplomatie américaine. Ces sanctions avaient été levées par les Etats-Unis en 2015 mais viennent d'être rétablies après la décision de Donald Trump en mai dernier de sortir de l'accord sur le nucléaire iranien.
Pour autant, la Cour de La Haye donne en partie raison à Téhéran. Les juges estiment en effet à l'unanimité que les sanctions sur certains biens doivent être levées et ce pour raisons humanitaire. Il s'agit notamment de médicaments contre le cancer ou le diabète, de matériel médical, de certaines denrées alimentaires ou encore de pièces destinées à l'aviation civile.
Selon la CIJ, sanctionner ces produits est une violation d'un traité d'amitié remontant à 1955 entre l'Iran et les Etats-Unis, qui n'ont pourtant plus de relations diplomatiques depuis 38 ans. En réponse, Mike Pompeo a donc immédiatement annoncé la fin de ce vieux traité, assurant que les Etats-Unis veillent « déjà à ce que les produits humanitaires soient épargnés ». Quoi qu'il en soit, la CIJ n'a pas de moyens coercitifs. Dans le passé, Etats-Unis et Iran ont déjà chacun ignoré ses décisions.
Une décision sans conséquence ?
Vincent Eiffling, chercheur associé au CECRI, le Centre d’étude des crises et des conflits internationaux, estime en effet que l’administration Trump risque de faire peu de cas de la décision de la CIJ. « C’est une victoire diplomatique pour l’Iran, qui a toujours cherché à essayer de se mettre du côté du droit international pour montrer sa bonne foi. Cela dit, lorsque l’on voit le peu d’intérêt que porte l’administration Trump au respect du droit international, il y a très peu de chances qu’elle respecte le verdict de la Cour, sachant qu’elle a déjà annoncé qu’elle ne reconnaissait pas les compétences de la Cour sur ce cas présent. »
Mais Vincent Eiffling « ne pense pas que cela va avoir un impact significatif ». Le chercheur considère que « c’est avant tout une victoire dans le domaine de la communication pour l’Iran, qui cherche toujours à se présenter comme la victime par rapport aux Etats-Unis ». Mais cette victoire pèse peu en comparaison de l’impact des sanctions. « Ils peuvent brandir le fait que la Cour internationale de justice leur a donné raison, donc ils sont du bon côté du droit international. Mais dans les faits, le poids des sanctions américaines et les contraintes qui sont imposées à l’Iran sont tels que ce texte ne va pas changer grand-chose. »