De notre correspondant à Jérusalem,
Dans l’organisation des manifestations à Gaza, il y a différentes brigades, chacune avec sa tâche. Il y a par exemple la brigade chargée d’apporter sur les sites des rassemblements les pneus à faire brûler afin de créer un écran de fumée noire entre les tireurs d’élite israéliens et les protestataires palestiniens.
Et puis il y a une brigade qui fabrique des cerfs-volants. Ils sont d’une hauteur d’homme à peu près. Leur structure est très simple, en général en bois. Sous les cerfs-volants sont accrochés des vêtements en feu. Les Gazaouis les font voler dans le ciel. Et quand le vent les a suffisamment poussés vers le territoire israélien, ils coupent alors la corde.
Selon le ministre israélien de la Défense, plus de 600 cerfs-volants ont ainsi été lancés depuis le début de la « Grande marche du retour » il y a un peu plus de deux mois. 400 ont pu être interceptés. Mais environ 200 ont déclenché des incendies du côté israélien derrière la barrière de séparation. Les Palestiniens, eux, appellent ces cerfs-volants leurs « F16 ». Une façon d'affirmer que leurs armes sont dérisoires par rapport à celles de l’aviation israélienne.
Dégâts importants
Selon les estimations des autorités israéliennes, près de 2 500 hectares de champs ont brûlé. Essentiellement des cultures de blé. Le gouvernement israélien estime les dégâts à plusieurs millions d'euros.
Et puis de vastes espaces naturels ont aussi été incendiés : plus de 600 hectares de forêts, de réserves naturelles ou de brousse. Des incendies qui ont un impact environnemental important, estime le Fonds national juif, une ONG propriétaire de nombreux terrains aux alentours de la barrière de séparation. A ses yeux, ces feux menacent des espèces animales et leur habitat.
L’usage de ces cerfs-volants incendiaires est nouveau. Et les autorités israéliennes sont relativement démunies face à ce phénomène. Face aux roquettes, l'armée a installé un bouclier anti-missile. Et lorsque des tirs émanent de la bande de Gaza, elle bombarde des cibles du Hamas, le mouvement islamiste au pouvoir dans l’enclave.
Interception compliquée
Mais face aux cerfs-volants, la réponse est plus compliquée. L’armée essaye d’intercepter ces cocktails Molotov volants avec des drones. Mais un tiers d’entre eux atteignent tout de même le territoire israélien. Et pour l’instant, elle n’a pas réagi à l’intérieur de la bande de Gaza pour tenter de dissuader les Gazaouis d’envoyer ces cerfs-volants.
Les responsables de la sécurité multiplient les réunions sur ce phénomène qu'ils nomment désormais « terrorisme des cerfs-volants ». La difficulté pour eux, c'est que ceux qui manipulent ces cerfs-volants ne se trouvent pas en première ligne des manifestations. Ils sont souvent dans des zones où se trouve beaucoup de monde. Leur tirer dessus sans risquer d’autres victimes est donc compliqué pour l’armée. Mais le ministre de la Défense promet une réponse selon un calendrier qui conviendra à Israël.