Avec notre envoyée spéciale à Kirkouk, Oriane Verdier
Mahmoud est policier de la région de Kirkouk. Il se bat aux côtés des peshmergas. En un an, il a été victime deux fois de suite d’une attaque chimique menée par l’Etat islamique.
« Lorsque j’ai senti l’odeur du gaz, j’ai ordonné à mes hommes de trouver un foulard, de le mouiller et de le mettre autour de leur nez pour atténuer les effets du gaz, raconte Mahmoud. Nous avons de l’expérience avec le régime précédent de Saddam Hussein qui a utilisé des armes chimiques contre la population kurde. Mais aujourd’hui, j’ai constamment mal aux yeux et je porte encore des séquelles sur mon corps. A force de me gratter, j’ai des blessures partout. Si on est exposé deux fois par an à ces substances chimiques, il est possible que nous soyons gravement malades sur le long terme. »
Ces attaques se sont en effet multipliées cette année le long du front entre Daesh et les forces sur le terrain, comme explique le général Amid Sarhad, chef de la police de la région de Kirkouk : « Il y a eu des attaques à Taza, à Bashir, sur toutes les frontières sur lesquelles les peshmergas sont présents. Nous n’avons pas d’équipement contre le gaz. Le ministère des peshmergas a demandé de l’aide à la coalition internationale pour qu’ils nous procurent de quoi apporter les premiers soins et des masques à gaz pour les peshmergas et pour les forces de sécurité. »
Les autorités kurdes communiquent peu sur ces attaques et ont demandé aux médias locaux de faire preuve de discrétion, afin de ne pas effrayer les peshmergas.
L'OMS apporte son aide à l'hôpital de Kirkouk
Une délégation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est venue cette semaine apporter son aide à l’hôpital général de la ville pour qu’il soit prêt, s’il devait recevoir de nouvelles victimes d’attaques chimiques. Reportage.
Un petit bâtiment en préfabriqué est situé en face de l’hôpital de Kirkouk. C’est là que se dérouleront prochainement les douches de décontamination. Burhan Amorochid, le directeur des urgences, le fait visiter à deux experts de l’Organisation mondiale de la santé. « Cet espace est prévu pour se déshabiller, ici prendre une douche puis mettre de nouveaux habits. Je me demandais s’il serait possible d’enlever le toit. Comme ça vous respectez l’intimité du patient, mais vous pouvez également renouveler l’air », dit-il.
Lors de la dernière attaque chimique, il y a trois mois, ces installations n’existaient pas. Burhan Amorochid s’est retrouvé démuni face aux centaines de victimes qui arrivaient dans son hôpital.
« Nous n’étions pas habitués à gérer ce genre de situations, c’est pourquoi nous avons demandé à différentes organisations des formations pour pouvoir soigner les blessures immédiates, mais aussi suivre les blessés sur le long terme puisque les séquelles du gaz moutarde peuvent apparaître plus tard. C’est la première attaque visant des civils, c’est pour ça que nous avons réussi à mieux attirer l’attention. Les semaines précédentes, il y avait eu plusieurs attaques sur le front des peshmergas mais personne ne s’y était intéressé parce que c’était considéré comme une opération militaire entre combattants », affirme le directeur.
Les médecins de l’hôpital de Kirkouk suivent actuellement des formations. Les nouvelles installations contrôlées par l’OMS devraient bientôt pouvoir accueillir peshmergas et civils.