Avec notre envoyée spéciale dans le sud d'Israël, Murielle Paradon
Des centaines de migrants africains quittent le centre de rétention semi-ouvert de Holot, dans le sud d’Israël. Nous sommes en plein désert du Néguev, au milieu de nulle part, à quelques kilomètres de la frontière égyptienne. La chaleur est écrasante. Ces clandestins, tout juste libérés, attendent longuement, avec leurs valises, qu’un bus les emmène dans une ville voisine. Hagard, ils se demandant où ils vont passer la nuit.
Les Israéliens ont interdit aux clandestins d’aller dans certaines villes du pays, où les migrants sont déjà très nombreux. C'est le cas à Tel Aviv et Eilat, où la présence d'une forte communauté d’immigrés a conduit à des tensions avec la population israélienne. « Je ne suis pas content. J’ai passé vingt mois en prison, à ne rien faire. Et maintenant je ne sais pas où aller. Je n’ai pas le droit d’aller à Tel Aviv ou Eilat. Que faire ? C’est très difficile », confie Jafar, originaire du Soudan.
Le problème, c’est que les migrants avaient leurs repères dans les villes où ils ont été décrétés persona non grata. Ils avaient leur communauté sur place ; ils partageaient un logement, avaient un petit boulot dans un hôtel ou un restaurant... D'où leur désarroi : ils ne savent vraiment plus où aller. Certains ont pris un bus pour Beer-Sheva, une grande ville plus au Nord, mais sans y avoir la moindre attache.
D’autres voulaient tenter Arad, mais le maire a dépéché des policiers aux entrées de la ville pour empêcher l’arrivée de ces migrants. Ils devront donc trouver d'autres destinations, ou retourner dans leur pays d’origine, par exemple l'Erythrée ou le Soudan. Une solution inenvisageable pour le Soudanais Hussein, 43 ans - dont 15 passés en Israël. « J’avais des problèmes avec le gouvernement au Soudan. Je me suis enfui de prison. Je suis venu en Egypte et ensuite ici en Israël. C’était pour sauver ma peau », confie-t-il.
Et puis, même si ces migrants trouvent un point de chute, va se poser rapidement la question de leur séjour en Israël. Ceux que nous avons rencontré ont obtenu un permis de deux mois pour rester sur le territoire. Que va-t-il se passer après ? S’ils n’obtiennent pas de papiers, le statut de réfugié étant difficile à obtenir, ils se retrouveront de nouveau dans l’illégalité, condamnés à errer et à se cacher pour ne pas être encore arrêtés.