Avec notre correspondant à Londres, Eric Albert
La nouvelle selon laquelle ce serait un Britannique qui aurait décapité le journaliste américain James Foley a beaucoup choqué au Royaume-Uni. Apparemment, le bourreau, qui se ferait appeler « John », est un Londonien. Il a une manière de s'exprimer typique des banlieues de Londres.
Pour le grand public, qu’un homme, élevé ici, puisse basculer vers un tel extrémisme aux pratiques barbares, a permis de prendre conscience de ce que les autorités britanniques savaient déjà : il y a au moins 400 à 500 Britanniques qui combattent actuellement en Syrie et en Irak. Un chiffre contesté d’ailleurs car largement supérieur selon certains.
Outre ceux qui sont partis, il y a aussi ceux qui sont revenus soit à peu près 250 anciens jihadistes qui ont quitté la Syrie pour la Grande-Bretagne. La crainte qu’ils mettent en place des cellules terroristes est grande.
La mémoire blessé des Britanniques
La mémoire du terrorisme est très vivace. Le souvenir des attentats du 7 juillet 2005, dans le métro de Londres est encore très présent et les terroristes de l’époque, il s'agissait d'une opération suicide, étaient des Britanniques, élevés en Grande-Bretagne. On se souvient aussi de ce soldat britannique égorgé à Londres en mai 2013 par deux hommes se revendiquant des « soldats d'Allah ».
Autre raison qui explique l'acuité du sujet, la Grande-Bretagne a été un pays clé de la guerre en Irak et les convulsions de ce pays, et les exactions de l’Etat Islamique, sont des conséquences de cette guerre.
Empêcher de partir pour le jihad
Dans les années 1990, les autorités britanniques toléraient la présence d'extrémistes islamistes sur son sol. On se souvient du « Londonistan ». Mais après les attentats du 11 septembre 2001, et encore plus après ceux du métro de Londres, les autorités ont décidé de ne plus autoriser les prédicateurs extrémistes. Les plus connus, Abu Hamza, Abu Qatada ont été déportés.
Les autorités britanniques se sont coordonnées avec les autorités françaises, belges mais aussi turques. Elles financent aussi des associations musulmanes qui tentent de faire de contre-radicalisation, notamment sur internet, en expliquant que les messages extrémistes n’ont rien à voir avec l’islam.
Dans une tribune publiée ce samedi dans le Daily Telegraph, la ministre britannique de l’Intérieur Theresa May rappelle qu’elle lutte déjà activement contre le terrorisme. Elle a fait confisquer les passeports de personnes qui voulaient partir en Syrie. Elle a aussi poursuivi en justice près de 70 d’entre eux qui sont revenus de Syrie.
Mais la ministre y affirme qu’elle veut aller plus loin. Elle envisage en particulier le droit d’interdire l’existence de groupes extrémistes, même ceux qui ne sont pas impliqués directement dans le terrorisme. Elle veut aussi obtenir de nouveaux pouvoirs pour arrêter les prédicateurs qui radicalisent les jeunes.
Cette annonce est une réponse aux députés, de tous les bords politiques, de durcir les lois contre le terrorisme. Certains demandent notamment la réintroduction de l’assignation à résidence de suspects de terrorisme, sans procès. Ce pouvoir existait au Royaume-Uni jusqu’en 2011 mais il a été supprimé parce qu’il allait contre les principes de base de la loi britannique. Mais Theresa May ne se prononce pas pour l’instant sur sa réintroduction.