Avec nos envoyés spéciaux à Erbil, Angélique Férat et Nicolas Falez et notre correspondant à Genève, Laurent Mossu
La localité chiite de Tal Afar - située dans une région à majorité sunnite du nord de l’Irak - est en grande partie passée sous le contrôle des islamistes et rebelles sunnites, a indiqué, ce mardi 17 juin, un responsable du gouvernement irakien. Selon les autorités de la province de Ninive, des unités de l’armée nationale contrôleraient néanmoins encore certains secteurs de la ville.
En revanche, à Baqouba, chef-lieu de la province de Diyala, au nord-est de Bagdad, la conquête de la ville par les insurgés islamistes et sunnites a fait long feu. Dans la nuit, en effet, selon l’armée et la police, un groupe d’assaillants aurait pris le contrôle de plusieurs secteurs de la ville avant d’en être chassés par les soldats du régime. Un assaut qui aurait coûté la vie à 44 personnes.
Néanmoins, les prises de guerre des islamistes et de leurs alliés rebelles sunnites sont nombreuses. Ils contrôlent ainsi Mossoul, la deuxième ville du pays, Tikrit la ville de Saddam Hussein, Baiji et sa raffinerie, et donc, désormais, Tal Afar. La prise de cette dernière ville a d'ailleurs entraîné un nouvel exode vers le Kurdistan irakien. On a vu ces derniers jours que les jihadistes tenaient à contrôler cette frontière pour y faire circuler des hommes entre Syrie et Irak mais aussi pour redessiner la carte de la région et faire apparaître les contours de l’Etat islamique qu’ils revendiquent. Les rebelles contrôlent désormais trente bases militaires.
Mais l’armée irakienne contrôle toujours des points stratégiques. Ainsi la division qui défend la raffinerie de pétrole de Baiji, est encerclée par les rebelles, mais elle tient bon. La ville de Samara, au nord de Bagdad, n’est pas tombée. Les Kurdes contrôlent les champs de pétrole de Kirkouk et de Mossoul. Ils contrôlent aussi le poste frontière de Rabia au nord-ouest de Mossoul. L’autre point important est que l’avancée vers Bagdad, est ralentie, voire stoppée. Les renforts militaires venant du Sud sont arrivés. Les milices populaires arrivent elles aussi peu à peu sur le terrain des opérations.
Exécutions sommaires
Durant sa progression, l’EIIL a commis des pillages, mais aussi des massacres dont les images ont été largement relayées sur internet. Des centaines de soldats irakiens ont été exécutés alors que les combats avaient cessé, ainsi que des civils, des chefs religieux et des fidèles au gouvernement de Bagdad. A Genève, le Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Navy Pillay a dénoncé « les exécutions sommaires perpétrées ces derniers jours par les forces alliées de l’EIIL ». Selon l’ONU ces tueries qui ont eu lieu dans la région de Tikrit constituent probablement « des crimes de guerre ».
Ces mêmes groupes armés jihadistes ont abattu l’imam de la grande mosquée de Mossoul le 12 juin dernier pour avoir refusé de prêter allégeance à l’EIIL. Deux jours plus tard, un sort identique a été réservé à douze imams locaux devant la mosquée d’al-Israa dans cette même ville de Mossoul. Navi Pillay souligne que les chiffres avancés de centaines de morts n’ont pas encore pu être vérifiés, mais que le fait d’avoir mené des exécutions sommaires systématiques est indéniable.
Evacuations
A Bagdad, la capitale, plusieurs pays ou organisations prennent des mesures face à l’avancée des jihadistes et de leurs alliés. Les Etats-Unis évacuent une partie de leur personnel diplomatique et envoient 275 militaires pour protéger leur ambassade. L’ONU a également annoncé le départ de 58 de ses employés internationaux de la capitale irakienne sur un total de 200.
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