Après la mort d'Ariel Sharon, réactions contrastées au Proche-Orient

Aucune réaction officielle de Palestine pour l’instant après l’annonce du décès à 85 ans, ce samedi 11 janvier, d’Ariel Sharon. Il faut dire que le personnage n’était pas très aimé dans les Territoires palestiniens. Du côté de la rue israélienne, les réactions sont plus mitigées.

La mort de cette figure controversée ne laisse personne indifférent. Sauveurs pour les uns, criminel pour les autres. Israël s’incline « devant la disparition de ce guerrier courageux et grand chef militaire » dit le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu. De l’autre côté du mur de séparation, en Palestine, on regrette qu’Ariel Sharon n’ait pas été traduit devant la justice internationale. « Criminel aux mains couvertes de sang », les différents mouvements palestiniens, Hamas, Fatah, ne mâchent pas leurs mots.

Vu de Palestine : un homme indirectement lié au massacre de Sabra et Chatila

Avec notre correspondante à Ramallah, Emilie Baujard

Ariel Sharon n’a pas laissé de bons souvenirs dans la mémoire des Palestiniens. Il a souvent été accusé d’être intransigeant, sans sentiment quand il s’agissait de traiter avec les Palestiniens ou les pays arabes voisins.

Il reste celui qui a favorisé l’implantation de dizaines de milliers de colons israéliens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Et même le retrait unilatéral des colons de Gaza en 2005 n’a jamais fait oublier à la population palestinienne son implication indirecte dans le massacre du camp de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila au Liban 1982. Alors ministre de la Défense, il est accusé d’avoir été au courant et de n’avoir rien fait pour empêcher ces massacres.

→ A (RE)LIRE : Mort d'Ariel Sharon, guerrier et politique

Et puis, enfin, pour les Palestiniens, Ariel Sharon reste celui qui a provoqué les violences qui ont mené à la seconde Intifada en 2000. Ariel Sharon s’était rendu sur l’Esplanade des mosquées à Jérusalem, un lieu réservé aux musulmans. Sa visite avait déclenché une vague de violences dans les territoires palestiniens.

­■ Vu du Liban : un lourd passé de criminel, selon le Hezbollah

Avec notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh

La mort d’Ariel Sharon n’a suscité aucune réaction officielle ou commentaire de la part des hommes politiques, mais elle a été accueillie par des tirs de joie dans le camp d’Aïn el-Héloué, le plus grand rassemblement de réfugiés palestiniens au Liban, à 50 km au sud de Beyrouth.

Les principaux sites d’information du pays et ceux des grands journaux se sont contentés de rapporter la nouvelle en reprenant des dépêches des agences de presse. Les sites du Hezbollah, eux, ont mis en évidence « les crimes qu’il a commis tout au long de sa carrière ». Le site officiel du parti évoque un lourd registre criminel avec des milliers de victimes palestiniennes, libanaises et égyptiennes. « Le massacre de Sabra et Chatila est l’un des témoins de ses crimes », titre ainsi un article publié sur ce site.

Al-Manar, le site de la télévision du Hezbollah publie une longue biographie d’Ariel Sharon qui s’ingénie à démolir la légende du grand chef militaire pour mettre en exergue « sa brutalité contre les populations civiles palestiniennes et les prisonniers de guerre égyptiens, ainsi que les graves erreurs de jugement qu’il a pu commettre lors de ses différentes campagnes militaires ». Des erreurs qui lui ont valu, selon Al-Manar, un gel de sa promotion au sein de l’armée dans les années 1950.

Vu de la rue israélienne : des réactions nuancées

Avec notre correspondante à Jérusalem, Murielle Paradon

C’est la fin du Shabbat à Jérusalem, les rues s’animent et les habitants sortent. A la terrasse d’un café, Gaïa réagit à la mort d’Ariel Sharon : « Je m’en fiche de lui ! Je pense que s’il avait été une personne lambda dans son état, presque mort, depuis si longtemps, personne n’en parlerait aujourd’hui. Maintenant je pense qu’il était temps qu’il meure ».

Noam Cohen, un trentenaire venu se promener en famille, rend hommage, lui, à l’ancien Premier ministre. « C’était un grand politicien, affirme-t-il, un grand sioniste. Il a fait beaucoup pour Israël. Il va nous manquer. On l’aimait ».

Jérusalem est une ville conservatrice et on y trouve beaucoup de partisans d’Ariel Sharon. Moshe, lui, reconnaît que le personnage était aussi controversé mais il salue la stature de l’homme. « Que vous l’aimiez ou pas, que vous partagiez ses opinions ou non, c’était un grand homme, affirme-t-il. Les gens se rappellent des bonnes choses mais même ceux qui le détestaient sont tristes aujourd’hui ».

Partager :