Le collectif égyptien «Rébellion» revendique 22 millions de signataires contre Morsi

Le collectif Tamarod («rébellion»), qui avait lancé il y a deux mois une pétition pour réclamer une élection présidentielle anticipée en Egypte, a annoncé ce samedi 29 juin avoir récolté plus de 22 millions de signatures. Le collectif a appelé tous les défenseurs de la pétition à descendre ce dimanche sur toutes les places d’Egypte pour exiger le départ du président Morsi.

Avec notre correspondant au Caire, Alexandre Buccianti

Pour les membres du collectif qui organise la manifestation du 30 juin, Mohamed Morsi n’est plus le président légal de la république d’Egypte.

Le mouvement, qui affirme puiser sa légalité dans la vox populi, a récolté 9 millions de signatures de plus que les 13 millions de voix obtenues par le président Morsi lors de son élection, dont le premier anniversaire a lieu ce dimanche.

Ce président, ils l'accusent de « haute trahison à l’égard de la Constitution et du peuple ». Le mouvement de rébellion considère d'ailleurs que la Constitution est elle aussi caduque, puisqu’elle a été approuvée par beaucoup moins de personnes que les signataires de leur pétition.

Les membres laïcs du Sénat ont annoncé leur démission d’une assemblée qu’ils estiment aujourd’hui invalide. Soutenu par tous les partis d’opposition, le collectif Tamarod a élaboré un « après Morsi ».

Au programme : une présidence par intérim confiée au président de la Haute cour constitutionnelle et un pouvoir exécutif remis à un Premier ministre consensuel chargé du sauvetage de l’économie, de la restauration de la sécurité et de la rédaction de la nouvelle Constitution.

Vendredi 28 juin, des affrontements ont eu lieu entre anti et pro-Morsi. C’est à Alexandrie que les plus violentes confrontations ont eu lieu, mais le même scénario s'est répété dans d'autres villes du Delta.
 


«Peut-être que nous ne verrons pas la belle Egypte de l’après 30 juin»

Ahmed Adel est l’un des membres du comité d’organisation du collectif Tamarod. Interrogé par RFI, il dit ne pas être étonné du succès rencontré par la pétition appelant à une présidentielle anticipée.

« Sachant ce qu’est la politique des Frères musulmans, ce qu’ils ont fait, et leur stupidité, nous nous attendions à ce que le peuple se mobilise pour la liberté et contre la corruption. Il y a toujours autant d’injustice et de corruption, rien n’a changé ! Il n’y a pas vraiment de scénario pour l’après 30 juin, mais pour la plupart des gens, le plan, c’est de former un gouvernement de consensus pour une période de transition de six mois.

Il faut ensuite modifier la Constitution pour réviser ce qu’ont fait Hosni Moubarak, le Conseil militaire et Mohamed Morsi, qui ont donné un pouvoir très important au président. Puis il faut organiser des élections anticipées.

C’est un scénario pacifique mais je ne crois pas que les Frères musulmans vont le laisser se dérouler de cette façon. Ils ont toujours utilisé la violence, le terrorisme, la dictature. Je pense qu’ils vont de nouveau utiliser la violence contre nous. Nous risquons d’être attaqués, moi et les autres membres de la campagne, pendant la journée. Peut-être que nous ne verrons pas la belle Egypte de l’après 30 juin ».

C’est une opposition hétéroclite qui va manifester ce dimanche contre le pouvoir des Frères musulmans. Des militants laïcs, des partisans de l’ancien régime et de simples citoyens fatigués par les difficultés économiques et sociales. Il y aura aussi dans cette foule Mohamed Zaree, membre de l’Institut du Caire pour les études sur les droits de l’homme.

« Le nombre de violations des libertés a augmenté par rapport au temps de Moubarak, et elles sont de nature différente, a expliqué Mohamed Zaree à RFI . Des partisans du président Morsi ont commis beaucoup de violations, par exemple lors d’affrontements devant le palais présidentiel. Ils ont aussi assiégé la Cour constitutionnelle pour empêcher les juges de s’y rendre.

De nombreuses plaintes, pour le meurtre de manifestants ou d’autres crimes, ont été déposées contre des supporters de Morsi, mais il ne s’est rien passé. Alors que pour les plaintes contre des opposants, le procureur général est très réactif ! Il est aussi évident que les accusations de blasphème ont été utilisées de façon politique cette année.

Je crois que le pouvoir veut taire les peurs de la population, en faisant taire les médias, l’opposition et les groupes de défense des droits de l’homme. Pour ne pas être critiqué et pour contrôler le message qui parvient à l’Occident. C’est l’un de ses objectifs ».
RFI

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