Liban : bataille autour de la formation d’un nouveau gouvernement

Les négociations sur la formation d’un nouveau gouvernement devaient reprendre lundi 24 janvier 2011 au Liban. La bataille s'annonce serrée entre les partisans du Premier ministre sortant Saad Hariri et l'opposition menée par le Hezbollah.

Le président libanais Michel Sleimane doit consulter les députés libanais ce lundi sur le choix du futur Premier ministre. Les consultations devaient déjà avoir lieu la semaine dernière mais ont été repoussées tant la situation est tendue.

Le Liban est sans gouvernement depuis le 12 janvier, après que le Hezbollah et ses alliés se sont retirés du gouvernement d’union nationale dirigé par Saad Hariri. Depuis, deux camps s’affrontent : celui du Premier ministre sortant qui souhaite se représenter et celui du Hezbollah qui rejette la candidature de Saad Hariri. Dans cette bataille pour le pouvoir, le Parti de dieu peut compter sur le chrétien Michel Aoun mais aussi sur le druze Walid Joumblatt, qui s’est rallié à lui vendredi dernier.

Au soir du dimanche 23 janvier, le Hezbollah a joué l’apaisement. Dans un discours télévisé, le chef du mouvement islamiste Hassan Nasrallah a promis que si son candidat était nommé Premier ministre, aucun parti ne serait écarté, se prononçant pour un « gouvernement de partenariat national ». Hassan Nasrallah n’a toutefois pas indiqué quel candidat il soutenait. L’ancien Premier ministre Omar Karamé pressenti dans un premier temps aurait décliné la candidature pour des raisons de santé.

Craintes d’une mainmise du Hezbollah sur le pouvoir

Le discours rassurant du Hezbollah risque toutefois de trouver peu d’écho au sein des partisans de Saad Hariri. Quelques heures avant le discours de Hassan Nasrallah, une partie du mouvement du 14 mars, qui soutient Saad Hariri, mettait en garde contre un « coup d’Etat » du Hezbollah. Dans une lettre adressée au président libanais citée par le site internet du journal L’Orient Le Jour, les chrétiens du mouvement du 14 mars dénonçaient la mainmise « d’une milice sur l’Etat et le pays » et en appelaient à l’intervention de la Ligue arabe et du Conseil de sécurité de l’ONU pour résoudre la crise politique.

A l’origine de cette crise, le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) chargé de trouver les coupables de l’assassinat, en 2005, de l'ancien premier ministre Rafic Hariri. Son fils Saad Hariri, au pouvoir jusqu'au 12 janvier dernier, défend ce tribunal qui est une instance libano-internationale. Mais le Hezbollah qui craint d'être mis en cause dans l'assassinat de Rafic Hariri le rejette. Il estime qu’il est à la solde des Américains et de leurs alliés dans la région, les Israéliens. Le Hezbollah a donc fait pression sur Saad Hariri pour que celui-ci désavoue le tribunal, en vain, d’où la chute du gouvernement.

Dans l’attente d’une décision du Tribunal spécial pour le Liban

Le tribunal a déjà rendu son acte d'accusation il y a une semaine. Le contenu est pour l'instant secret. Il doit être rendu public dans les semaines qui viennent. Mais cela risque de se faire en plein vide politique, si les négociations pour former un nouveau gouvernement n’aboutissent pas. Cela pourrait arranger le Hezbollah. « Si une décision du tribunal est délivrée dans les prochains jours ou prochaines semaines, mettant en cause le Hezbollah, elle ne pourra pas être exécutée s’il y a vacance du pouvoir », analyse Marwa Daoudi, du Centre du Moyen-Orient à l'université d'Oxford, en Grande-Bretagne.

Durant cette vacance de pouvoir, certains craignent aussi que la situation se tende sur le terrain. Vendredi dernier, Fares Soueid, secrétaire général du mouvement du 14 mars, affirmait que « Le Hezbollah s’est déployé dans les rues de Beyrouth mardi dernier soi-disant de manière pacifique (…). Ils sont en train de semer la peur et la terreur ».

La crise politique actuelle ravive en effet le spectre des violences de mai 2008, lorsque les combats entre sunnites et chiites avaient fait des centaines de morts. Dimanche 23 janvier, le ministre égyptien des Affaires étrangère a estimé que le Liban était dans une « situation dangereuse ».
 

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