La femme indienne toujours victime du modèle traditionnel patriarcal

L'enrichissement d'une population n'est pas synonyme d'émancipation pour les femmes. C'est l'une des conclusions qui ressort de l’un des plus grands sondages réalisés sur la société indienne, mené auprès de 40 000 personnes dont une majorité de femmes et qui sera officiellement publié cette semaine. La tendance est donc assez négative...

De notre correspondant à New Delhi,

Quelques chiffres pour offrir un aperçu : 81% des femmes mariées interrogées ont indiqué qu'elles ne pouvaient pas se rendre chez le médecin sans demander l'autorisation à leur mari. Seulement 20% d'entre elles ont leur nom apposé sur les titres conjuguaux de propriétés, un manque de reconnaissance qui crée de graves problèmes au moment de l'héritage. Aussi, plus de quatre femmes sur dix n'ont pas pu donner leur avis sur l'homme qu'elles ont finalement épousé. Ce qui est plus inquiétant, comme l'indiquait la responsable de cette étude menée par le Conseil national des recherches économiques, c'est que cette situation n'a quasiment pas évolué depuis la dernière édition de ce méga-sondage, il y a sept ans. Dans certains cas, cela a même empiré. A noter tout de même que le mariage infantile a reculé, tout en restant très élevé : près d'une femme indienne sur deux est mariée avant l'âge de 18 ans...

Hausse des avortements dans les zones riches

C'était pourtant une période économique faste pour l'Inde. Pendant ces sept dernières années, le PIB du pays a crû de près de 7% par an, et des millions de foyers sont entrés dans la nouvelle classe moyenne. Mais dans l'ensemble, ce nouveau confort matériel n'a pas été synonyme d'émancipation pour les femmes, car le modèle traditionnel patriarcal demeure prédominant. Au contraire, c'est maintenant dans les quartiers les plus riches que se pratiquent le plus d'avortements de fœtus féminins, un acte illégal mais possible à réaliser quand on y met le prix. De même, les familles riches ont tendance à être plus protectrices des femmes, même pour aller chez le docteur comme nous l'avons évoqué précédemment. Il demeure bien sûr une frange aisée et plus libérale, surtout parmi ceux qui voyagent ou ont vécu à l'étranger, mais cela reste une minorité en général urbaine.

Quant aux moyens pour améliorer cette situation, les chercheurs insistent sur le besoin de rendre l'espace public et les villes plus sûrs pour les femmes, un changement qui est en train de s'opérer, par exemple à Delhi suite aux protestations contre les viols. Mais la mentalité patriarcale mettra elle plus de temps à évoluer, surtout dans les campagnes. Cette émancipation des femmes s'accroit généralement quand celles ci entrent dans le monde du travail, et cela a été efficace au sein des classes pauvres, où les familles ont besoin de ces revenus. Mais dans les foyers plus aisés, les femmes, même éduquées, arrêtent souvent de travailler pour s'occuper des enfants et de la belle-famille. Résultat, seulement 22% des femmes sont actives en Inde, l'un des taux les plus bas du monde. Et qui a encore baissé de sept points en sept ans.

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