Avec notre correspondant à Quito, Eric Samson
Aujourd´hui, personne ne peut plus imaginer un 31 décembre sans les « Años Viejos » en Équateur. Il ne s’agit pas d’un rite religieux, mais plutôt d’une coutume très populaire qui remonte environ à un siècle. L’idée, c´est de brûler ce que vous n´avez pas aimé au cours de l’année écoulée, ce qui a créé de « mauvaises vibrations ». Par exemple, si vous êtes un supporter du club de football « Barcelona » de Guayaquil, vous allez brûler l´effigie d´un joueur du club rival, « Emelec », pour le « punir » d’avoir gagné le championnat cette année. Même chose si vous n´aimez pas le président ou le député local… Hop, au bûcher !
Comme toutes les coutumes, celle-ci a évolué avec le temps, notamment à cause de l´influence des enfants. Ce sont eux souvent qui décident du modèle de mannequin que les parents vont acheter. Les plus jeunes aiment bien acheter le personnage qui les a marqués à la télévision ou au cinéma. Cette année, on retrouve à la vente tous les super-héros : Spiderman, Superman, les mignons, Chucky, Thor, ou encore les personnages de Monstre et cie.
En signe d´affection
Il y a aussi des gens pour qui cette cérémonie consiste à prendre un nouveau départ symbolique le 1er janvier. Alors, on brûle le bon et le mauvais de l’année écoulée. Dans ce cas, on ne cherche pas nécessairement un mannequin « négatif ». Et enfin, il y a les « vieilles années » affectueuses. Cela se pratique beaucoup dans les entreprises, au bureau… Lors du dernier jour de travail de l´année, on brûle son patron ou un cadre, mais comme cela se fait en leur présence, c’est généralement un signe d´affection… Dans ce cas, il faut que le mannequin soit fait à la demande : une vraie industrie pour certaines familles qui font cela pratiquement toute l’année, ou en tout cas dès les mois de juillet-août…
Certaines construisent les mannequins à partir de moules, mais d’autres les font encore avec des squelettes en bois, remplis de sciures, de vieux vêtements et des couches de papier journal peint et décoré à la main. A Guayaquil, il y a une rue spécialisée dans la vente des « Años Viejos », la rue du 6 mars. La police vient de la rendre piétonne sur 20 pâtés de maison pour que les gens puissent venir acheter leurs mannequins sans être embêtés par les bus. Il y a aussi les experts, qui construisent des mannequins de 7 mètres de haut, de véritables œuvres d´art qu’ils financent en faisant payer les photos et qui participent à des concours. Les prix vont de 10 à 500 dollars pour les plus grands. On les brûle en général dans la rue, mais maintenant il y a des contrôles. La police interdit que les « Años Viejos » soient brûlés sur l’asphalte ou les pavés pour ne pas abimer les rues. Les stations-service sont également fermées pendant quelques heures à partir de minuit pour éviter les incendies…
« Cette année, j’ai bien envie de brûler un joueur de l´équipe équatorienne de football qui, ne l´oublions pas, sera dans le groupe de la France lors de la prochaine Coupe du Monde, confie un Français de Lima. Je n´y crois pas, mais bon, on ne sait jamais ! »