Plongée au coeur d'un « grand mariage »

Célébrer le « grand mariage » est une étape importante dans la vie des Comoriens. Dans certaines îles de l'archipel, il permet aux mariés de devenir des citoyens à part entière. Mais son organisation peut aussi se transformer en véritable gouffre financier. Récit. 

Article publié dans Hors Antenne en novembre 2016.

L’Union des Comores, ce sont trois îles de l’Océan Indien : la Grande Comore, Anjouan et Mohéli. Et il y a Mayotte qui a fait le choix en 1975 de devenir un département français. Tous les ans, près de 45 % de mariages dits culturels y sont organisés. Et dans chaque île, les familles ont leurs propres façons de s'habiller, de se maquiller, mais surtout d’organiser les festivités. Si ces unions sont une véritable richesse culturelle, elles peuvent néamoins devenir des gouffres financiers pour les familles qui doivent parfois économiser pendant des années avant de pouvoir célébrer le mariage de leurs enfants.

A la Grande Comore, par exemple, les communes ont même établi des chartes définissant les conditions d'organisation d'un mariage. L'époux doit ainsi investir près de 80 000 euros et la femme 40 000 euros. Sans oublier l'argent offert par les associations locales et les nombreux zébus à acheter.

Se marier pour devenir citoyen

C'est le cas de Malyk, 35 ans, et d'Eleana, 33 ans. Ils sont tous les deux nés aux Comores, mais ils vivent à Paris depuis 11 ans. En 2012, ils ont célébré leur mariage religieux à Paris, puis en 2014 leur mariage civil à la mairie et cette année, ils sont venus exceptionnellement à Domoni, la capitale de l'île d'Anjouan, pour célébrer leur mariage culturel.

« C’est fou, le grand mariage aux Comores !, s'exclame Malyk, une femme gagne beaucoup d’argent. La dot est très importante. Je voulais faire plaisir à ma famille, alors j’ai donné 2000 euros, soit un million de francs comoriens. Et ce n’est pas tout, il y a aussi les bijoux. Cela coûte au moins 4000 à 5000 euros. Lorsqu’on rentre en France, certains pensent qu’on va les vendre ».

Même si un grand mariage représente un coût important, pour un couple de Comoriens, le célébrer est une étape indispensable pour être reconnu officiellement marié. Dans certaines régions de l’archipel, tant qu’une personne ne l'a pas fait, elle ne peut pas participer à certaines activités.

C’est le cas à la Grande Comore où dans certaines mosquées, des places sont réservées à ceux qui ont fait l'Anda (grand mariage). Le marié a aussi la permission de donner des instructions dans sa région, voire dans son île. En revanche, ceux qui n’ont pas suivi ce rite ne peuvent pas s’imposer ou s’inviter dans une danse avec les autres.

A Mohéli, la petite île de l’archipel, un rite de ce genre donne aussi du pouvoir aux mariés. Lorsqu’une cérémonie de grande envergure est organisée, on peut ainsi les distinguer grâce aux colliers de fleurs qui leur sont remis.
A Anjouan ou encore dans l’île de Mayotte, en revanche, les pouvoirs en société restent les mêmes. Les personnes sont respectées et peuvent participer aux réunions. Dans les cérémonies, il est ainsi impossible d’identifier, par leur mode vestimentaire, ceux qui l'ont fait ou pas. A Mayotte, les habitudes culturelles commencent cependant à changer en raison des lois françaises qui ne permettent plus la tenue de manifestations culturelles jusqu'à l'aube.

Elenea, quant à elle, est ravie: « Avec mes parents et mon mari, nous sommes soulagés. Nous avons fait notre devoir. Je peux commencer ma vie, penser à notre avenir et maintenant, je peux même participer à différents événements! ».

Soilah Naouir Papamwegne
Radio Domoni Inter, Anjouan, Comores
papamwegne.rfo@gmail.com
 

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