Michel Redondo, l'oeil d'un photographe français en Colombie

Il voyage depuis l'âge de 20 ans à travers le globe. Depuis deux ans, Michel Redondo vit à Medellín, en Colombie. A 58 ans, il raconte son parcours de photographe, entre les voyages, les missions avec l'ONG Médecins du monde et son enlèvement par la guérilla ELN. Récit.

De notre correspondante à Medellín,

Ses yeux brillent encore à chaque photo qu'il évoque ou dévoile au public. Il n'a rien oublié, même après des dizaines d'années de photographie. Michel Redondo est né au Maroc, de parents espagnols. Il est arrivé en France à l'âge de six ans.

Voyager est comme un virus pour lui. Il a donc commencé jeune. Son premier voyage était en Egypte. « Je suis arrivé au Caire à 2h du matin, sans hôtel, sans rien. Je crois que ça serait difficile de faire pareil aujourd’hui. J'avais déjà l'esprit d'aventurier. » Ses voyages réveillent l'oeil du photographe. « A l'époque, c'était des diapositives qu'on projetait. Aujourd’hui je suis au numérique. C'est un grand changement. J'ai appris seul et en pratiquant au sein d'une association de photo à Montauban. Je développais moi-même. »

Originaire de Quimper, Michel a longtemps vécu à Montauban avant de sillonner l'Amérique centrale et latine. « Vivre en Colombie n'est pas toujours facile. Mais en général les gens sont accueillant. Comme tout Français, ce qui manque ici c'est la bonne nourriture française. »

Des photos primées plusieurs fois en Colombie

L'une de ses photos a été sélectionnée et primée en octobre dernier pour le festival « Diversité » de Medellín. « C'était une photo que j'ai prise dans le quartier de Santo Domingo, un des quartiers populaires de la ville, raconte Michel Redondo. On y voit un groupe de jeunes Colombiens noirs devant l'entrée de l'association “Colombianitos”. J'avoue que je ne vois pas vraiment le racisme ici. C'était plutôt pour la beauté de la photo. »

Le photographe français connait la Colombie depuis douze ans. En 2007, il s'est marié avec une Colombienne. Entre temps, il est retourné vivre en France. Mais, l'Amérique latine lui manquait et sa femme ne s'y habituait pas. Alors, ils sont revenus en Colombie, un pays qui l'inspire. « Les Colombiens apprécient la photo. Parfois, ils en demandent. Pour moi qui aime les photos de gens dans la rue, l'humain, les quartiers populaires, c'est un bonheur. Je n'arrive pas à prendre des photos en France. Je trouve qu'il y a beaucoup plus d'opportunités en Colombie. Les gens sont plus accessibles. Si je devais sortir des photos de France comme celle que je fais ici, ça serait difficile. »

Pour sortir l'humanité dans chacune de ses photos, Michel s'aventure dans les prisons.« Je voulais voyager avec un but. Je suis donc allé au Nicaragua et j'ai pris des photos d'enfants des rues. A mon retour en France, un ami qui était éducateur dans une prison m'a demandé d'exposer mes photos dans sa prison. Les détenus me demandaient ce que devenaient ces enfants. Je répondais : “Ils finissent au même endroit que vous”. C'est ainsi que l'idée de la série sur les prisons est née. » Il retournera alors au Nicaragua, au Mexique et en Colombie à Quibdo, pour visiter les prisons de chaque pays et faire des portraits.

Enlevé trois jours par la guérilla ELN

En 2004, dans ce même département colombien, Michel Redondo est enlevé trois jours par la guérilla ELN, l'Armée de libération nationale. C'était trois mois après son arrivée dans le Choco où il travaillait comme logisticien avec l'organisation Médecins du monde. « C'était une erreur. Ils cherchaient un gros poisson. On était dans un bateau, ils nous ont kidnappé avec un séminariste colombien. » Comme à l'époque, il garde le sang froid en évoquant l'histoire. Ce qui l'a plus marqué, ce sont ses treize mois de travail dans la jungle avec l'ONG.

Michel a deux enfants qui vivent encore en France : un de 31 et l'autre de 27 ans. Il affirme qu'il ira les voir mais qu'il n'a aucun projet d'installation en Europe. « Si je devais rentrer en France, j'irai vivre à Marseille, une ville que je trouve cosmopolite. Si je devais rentrer... », confie-t-il.

Partager :