L'Alliance pour l'alphabétisation, nouvel acteur de la lutte contre l'illettrisme

L'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) a créé jeudi 8 septembre, à l’occasion de la 50e journée internationale de l’alphabétisation, une alliance mondiale pour l’alphabétisation (AMA). S’appuyant sur les Etats comme sur les acteurs locaux, l’initiative a été lancée en même temps que l’organisation décernait plusieurs prix pour récompenser des initiatives de lutte contre l’illettrisme.

« Il n’y a jamais eu de projet plus humaniste et plus ambitieux » que celui d’alphabétiser l’ensemble des populations du monde. Mais la directrice générale de l’Unesco est inquiète. « Au rythme où vont les choses c’est impossible. J’insiste, nous ne pourrons jamais y arriver », déplore Irina Bokova depuis la tribune de la maison de l’agence des Nations unies à Paris, devant un parterre de ministres de l’Education, d’ambassadeurs, de membres d’ONG et d’observateurs.

Pourtant, en cette 50e journée internationale de l’alphabétisation, Irina Bokova reste optimiste. « Notre objectif est clair : que le plus grand nombre d’hommes et de femmes sachent lire, écrire, compter », poursuit-elle. Et l’Alliance mondiale pour l’alphabétisation, lancée ce jeudi 8 septembre par l’Unesco, doit permettre d’« accélérer les progrès déjà effectués par nos Etats membres dans la lutte contre l’illettrisme ».

« Aucune société ne peut pleinement fonctionner sans l’alphabétisation »

L’analphabétisation est un problème constaté au-delà de 15 ans – puisqu’avant cet âge, l’accès à l’école est encore théoriquement possible. Aujourd’hui, 758 millions d’adultes dans le monde ne savent pas lire ou écrire une phrase simple, selon le troisième Rapport mondial sur l’apprentissage et l’éducation des adultes (GRALE III) publié dans la foulée de la journée internationale de l’alphabétisation.

L’Alliance créée ce jeudi par l’Unesco doit « rassembler les Etats, les spécialistes de l’éducation, les ONG, les membres des sociétés civiles », explique Irina Bokova. Pour l’ancienne parlementaire bulgare, « aucune société ne peut pleinement fonctionner sans l’alphabétisation ». Les études ont prouvé que la maîtrise de la lecture et de l’écriture par une population améliore son hygiène, son dynamisme économique et sa capacité à s’organiser politiquement.

« Savoir c’est pouvoir »

Le problème est posé, mais les solutions se font attendre. « On veut des actions concrètes, souffle Mauricio Lopez Velasquez, directeur général de l’Institut national pour l’éducation des adultes mexicain, en marge d’une réunion. Les conférences, les discours sont nécessaires, mais ne suffisent pas. Il faut que l’Unesco incite les Etats à la coopération. » Diagnostic partagé par Alan Tucket, ancien président du Conseil international pour l’éducation des adultes : « La coopération internationale permet de partager des idées, de voir ce qui marche ailleurs, c’est l’intérêt de journée comme aujourd’hui. Savoir c’est pouvoir, lire et écrire c’est l’indépendance, l’accès à une meilleure situation, et il faut permettre au plus grand nombre d’y arriver. »

Alors comment l’Alliance mondiale pour l’alphabétisation va-t-elle atteindre ses objectifs ? Pour l’heure, les plans d’action sont encore sur l’établi, mais l’AMA devrait s’appuyer sur des projets déjà existants. A l'occasion de la 50e journée internationale de l’alphabétisation, étaient aussi remis 5 prix pour des projets de lutte contre l’analphabétisme. Ont été primées des organisations gouvernementales, comme l’institut de recherche sur les langues et les cultures d’Asie de l’université de Mahidol en Thaïlande, pour son programme de réconciliation des minorités linguistiques avec le reste de la population grâce à l’apprentissage bilingue, ou à des personnes, comme Nguyen Quang Thach, un Vietnamien qui a marché près de 3 000 kilomètres dans les zones rurales de son pays pour construire, avec l’aide de milliers de collaborateurs, des bibliothèques solidaires, 9 000 à ce jour.

Les lauréats de ces prix – soutenus par la Chine et la Corée du Sud – obtiennent 20 000 dollars. L’argent est d’ailleurs le nerf de la guerre pour l’Unesco, financée presque intégralement par les Etats membres, pour moitié sur leur contribution volontaire. « Nous avons environ 500 millions de budget annuel, constate Vincent Defourmy, directeur de l’information au public auprès de l’Unesco. On est une organisation internationale avec les moyens d’un petit hôpital ou d’une grande université. »

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