Un quart des suffrages exprimés et un tiers des eurodéputés que la France enverra au Parlement. La victoire du Front national est l’événement majeur de cette élection. Il y avait le 21 avril 2002, il y aura désormais le 25 mai 2014. Pour la première fois, l’extrême droite remporte en France une élection au niveau national.
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Avec 25,1 % des suffrages exprimés lors de ces élections européennes le parti de Marine le Pen multiplie presque par quatre son score de 2009 (6,34 %). Un score réalisé alors que la participation a été légèrement en hausse, par rapport au dernier scrutin européen (40,63 % de participation en 2009, contre 43,5 % pour ces élections 2014). Concernant la participation, il faut signaler que l'abstention a été particulièrement forte dans l'Outre-mer.
En deuxième position, largement distancé, l’UMP - sur fond d’affaires Bygmalion et de dissensions internes - ne profite pas, loin de là, de l’effondrement de la gauche. Avec 21 %, elle est bien l’UMP est bien au-dessous de son score de 2009 (27,88 %).
Le Parti socialiste, qui arrive en troisième position est à un niveau historiquement bas, avec 14,5 %, il fait encore moins qu’il y a 5 ans (16,48 %). Le Parti socialiste s’effondre, au niveau de l’humiliation subie par Michel Rocard en 1994.
Viennent ensuite les listes centristes UDI - Modem, qui passent au-dessus de la barre symbolique des 10 % (10,3 %) et sont au coude-à-coude avec Europe Ecologie Les Verts (9,4 %), en baisse par rapport à ses résultats de 2009 (16,48 %). Le Front de gauche, avec 6,50 %, se maintient au niveau de son score de 2009 (6,48 %). C’est cependant un échec pour Jean-Luc Mélenchon, qui avait fait campagne contre les politiques européennes d’austérité et espérait un score supérieur.
Un message de défiance
Ces résultats traduisent une vraie défiance des Français à l’égard de l’Europe. Car si, alors que l’on s’attendait à une abstention record pour ce scrutin, avec 43,50 %, on se trouve finalement sensiblement au-dessus du taux de participation de 2009, cela reste bien bas.
Et que le parti le plus anti-européen, le FN, qui prône notamment la sortie de l’euro, arrive en tête, c’est un signe de défiance vis-à-vis de l’Europe et, aussi, vis-à-vis des élites politiques françaises. C’est aussi un vote sanction pour le pouvoir socialiste et François Hollande, dans la droite ligne des municipales. Malgré le changement de Premier ministre, en deux mois, les Français ne se déjugent pas, et lancent à nouveau un sérieux avertissement à François Hollande.
Un « séisme », mais pas de changement de cap
Et pourtant, Manuel Valls l'a confirmé dimanche soir, dès l’annonce des premières estimations. La mâchoire serrée, il a évoqué un « séisme », parlé d’un résultat « choc » et qualifié le moment de « grave ». Les résultats de ce scrutin, pour le Premier ministre français, s'adressent « à tous les responsables politiques qui ont la charge d'agir » et, au-delà du « score médiocre » de sa majorité, il juge qu’il traduit « une crise de confiance, une colère qui rejaillit aussi sur l'adhésion au projet européen ».
Mais il a aussi insisté : pas question de changer de politique. Il faut « aller plus vite » dans les réformes. Le cap fixé dans son discours de politique générale du 8 avril dernier, devant l’Assemblée nationale, reste le même : réforme territoriale, plan d’économie, quête de compétitivité via le pacte de responsabilité... Un discours qui suscite déjà des crispations. Après la bronca d’une partie des députés PS suite à la déroute des municipales, de nouvelles turbulences sont à prévoir au sein de la majorité.
Hollande dit vouloir « tirer les leçons» de la défaite PS
Le chef de l’Etat, qui a dit vouloir « tirer les leçons » d’un scrutin qu’il a qualifié « d’événement majeur » dans un communiqué, a convoqué ce lundi Manuel Valls et les principaux ténors du gouvernement : Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, Michel Sapin (Economie), Bernard Cazeneuve (Intérieur), Stéphane le Foll (Agriculture, et porte-parole du gouvernement) et Harlem Désir (Affaires européennes), doivent faire le point à la veille d’une réunion des chefs d’Etat et de gouvernement européens qui doit se tenir ce mardi à Bruxelles. Dans le communiqué diffusé par les services de l'Elysée, François Hollande dit regarder « les choses et la réalité en face : six Français sur dix ne se sont pas déplacés, un électeur sur quatre a voté en faveur du FN ». Objectif déclaré du chef de l'Etat français : « Convaincre les Français que nous avons les moyens de changer l'Europe sans rompre avec elle ».
A l'UMP, « besoin de reconstruction »
Des remous, il va aussi y en avoir à l’UMP. La victoire aux municipales paraît déjà bien loin, et les couteaux sont affutés. Avec, en ligne de mire, Jean-François Copé, le président contesté, sur fond de soupçons de fausses factures. Pour Laurent Wauquiez, l'UMP a « besoin d'une profonde reconstruction ». Même son de cloche pour Bruno Le Maire, qui plaide pour que Jean-François Copé et la direction du parti fasse « la transparence totale sur ce qu'il s'est passé » dans l'affaire Bygmalion. Sur le front politique, la ligne très à droite a également été remise en cause par plusieurs ténors de l'UMP. Ainsi d'Alain Juppé, qui a défendu dès dimanche soirun rapprochement avec le Modem et l'UDI. « Recréons les bases d'un accord entre droite et centre », a-t-il plaidé., n'hésitant pas à faire l'addition des scores de l'UMP et des listes centristes, pour souligner qu'un tel parti serait s devant le FN à l'issue de ce scrutin.