Santé: le scorbut fait son retour en France notamment à cause de la précarité alimentaire

Le scorbut, une vieille maladie causée par un manque de vitamine C et qui avait disparu depuis le XXe siècle, est de retour en France, notamment depuis la crise du Covid. Si les cas se multiplient chez les enfants, la hausse de la précarité alimentaire et les effets de l'inflation en sont les principales causes.  

C’est une maladie vieille de plusieurs siècles et que l’on pensait disparue depuis le XXe siècle. Pourtant, selon une récente étude britannique publiée en décembre 2024, le scorbut, maladie liée à une carence en vitamine C est en hausse ces dernières années en France, notamment chez les enfants. Selon cette étude publiée dans la revue médicale The Lancet et menée par plusieurs médecins hospitaliers et des chercheurs de l'Inserm et de l'université Paris Cité, près de 900 enfants ont été hospitalisés pour des cas de scorbut en France entre janvier 2015 et novembre 2023. L'augmentation des cas la plus importante est enregistrée dans la catégorie d'âge des cinq à dix ans, notamment en situation de précarité. 

Si la maladie résulte d'une carence en vitamine C, cette dernière provoque entre autres des douleurs osseuses, de la fatigue ou encore des saignements de gencives. Dans de rares cas, elle peut entraîner le décès. Surnommée autrefois la « maladie du marin », elle sévissait surtout à bord des navires entre le XVIe et le XIXe siècle, où les marins privés de fruits et légumes frais pendant de longues périodes en souffraient fréquemment. Elle avait été éradiquée grâce à une alimentation moderne riche en fruits et légumes.

Un signal alarmant 

À travers leur étude, les chercheurs ont également démontré une corrélation entre le scorbut et la malnutrition des enfants hospitalisés liée à une situation de précarité. « Pour cela, on a comparé la proportion de malades qui avaient une couverture médicale universelle qui est un critère de précarité », explique le pédiatre Ulrich Meinzer, coordinateur de l'étude et pédiatre à l’hôpital Robert-Debré à Paris.

Si l'évolution du nombre de cas reste relativement lente jusqu'en 2019, les scientifiques ont noté une forte accélération depuis la pandémie de Covid-19, entraînant une augmentation des hospitalisations de 34,5%. « La période post-pandémique a exacerbé les vulnérabilités en matière de sécurité alimentaire. En France, cela a entraîné une dépendance croissante à l’aide alimentaire publique et bénévole. L'inflation a aggravé la précarité. C’est l’un des facteurs clés de la réapparition de cette maladie » souligne l’étude.

Bien que le scorbut ne soit pas aussi fréquent qu’à l’époque des grandes traversées maritimes, la hausse des cas met en lumière des problèmes d’accès à une alimentation nutritive face à la hausse de la consommation des aliments ultra-transformés et à la malnutrition. « La pandémie de Covid-19, les crises géopolitiques, sociales et économiques et les guerres dans le monde ont provoqué une forte inflation. Les familles en situation de précarité ne peuvent pas, ou plus, s’acheter des produits qui apportent suffisamment de vitamine C comme des légumes ou des fruits », explique auprès du Nouvel Obs Ulrich Meinzer.

Lutter contre la précarité alimentaire

Lutter contre cette hausse équivaut à assurer aux enfants une alimentation équilibrée. « Cela veut dire qu'il faut manger équilibré, donc commencer par des aliments frais et faire une cuisson douce. Il est recommandé de manger cinq unités de fruits et légumes par jour », ajoute le docteur Meinzer.

Les auteurs de l’étude formulent ainsi plusieurs recommandations comme « intensifier les programmes d'aide alimentaire et sociale » pour réduire le taux de malnutrition et d'insécurité alimentaire, mener des études similaires dans d'autres pays à hauts revenus afin d'avoir une vision d'ensemble du problème ou encore mener un dépistage proactif des populations à risque.

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