Retraites: les syndicats unis après les annonces d'Édouard Philippe

Le Premier ministre français Edouard Philippe a dévoilé ce mercredi 11 décembre les grands axes de la réforme des retraites voulue par l’exécutif. Loin de convaincre, le chef du gouvernement est désormais confronté à des syndicats unis.

Régimes spéciaux, système universel à points indexés sur les salaires, âge d'équilibre à 64 ans, basculement à partir de la génération née en 1975 : le Premier ministre a dévoilé mercredi en détails le projet de réforme des retraites du gouvernement. L'exécutif espérait ainsi faire baisser la pression en donnant des gages sur la transition pour les régimes spéciaux. Pari raté. Il risque maintenant de se retrouver face à une grève encore plus importante, portée par l’ensemble des syndicats.

Particulièrement scrutée, la CFDT a en effet basculé dans le camp de la mobilisation. Pour le premier syndicat de France, « une ligne rouge » a été franchie avec l’établissement d’un âge d’équilibre à 64 ans. « Il y a encore beaucoup d’insuffisances, notamment sur la question de la pénibilité, avec la réintégration des quatre critères qui avaient été exclus en 2017 [les postures pénibles, les manutentions manuelles de charge, les vibrations mécaniques et les agents chimiques dangereux, ndlr]. Il y a aussi des insuffisances sur le volet social de cette réforme, concernant notamment le minimum contributif avec un relèvement insuffisant », a regretté son patron Laurent Berger au micro de RFI.

Appel à la mobilisation le 17 décembre

A l'issue d'un bureau national, la CFDT a appelé « l'ensemble des travailleurs à se mobiliser le 17 décembre », date prévue par les opposants à la réforme pour la prochaine mobilisation. Sur le plateau de France 2, Laurent Berger a demandé au gouvernement de « revenir en arrière » sur « l'âge d'équilibre », qu'il a qualifié de « gros problème ». La CFTC a aussi appelé à se mobiliser mardi prochain.

Sans surprise, la CGT et FO, opposées depuis le départ à la réforme, ont quant à eux appelé à renforcer la mobilisation. Ce jeudi, les réseaux TGV, transilien et les transports d’Île-de-France seront fortement perturbés. « C’est le gouvernement qui a la balle dans son camp. C’est lui qui a les clés de la fin du conflit. On voit bien qu’il essaye de diviser les salariés, de diviser les organisations syndicales. Mais il n’y a rien qui permette de dire qu’on va aller vers un vrai système universel avec du progrès social », déplore Marie-Claire Cailletaud, présidente du groupe CGT au Conseil économique, social et environnemental (Cese).

Une déception et une détermination partagées à la RATP. L'Unsa, premier syndicat des transports parisiens, appelle ainsi à « installer la mobilisation dans la durée » et à « élargir le mouvement au-delà des transports », a indiqué son secrétaire général Thierry Babec peu après le discours du Premier ministre sur les retraites.

« Aucune avancée » selon les syndicats de police

Les principaux syndicats policiers ont assuré de leur côté ne voir « aucune avancée » dans le discours d'Edouard Philippe sur la réforme des retraites et menacent de « durcir » la mobilisation afin de conserver les conditions de leur régime spécifique. Signe de leur mécontentement, environ 200 policiers s'étaient réunis devant le palais d'Iéna où le Premier ministre détaillait le projet contesté de réforme gouvernemental.

Même son de cloche du côté de la FSU, première fédération syndicale chez les enseignants : « Le mécontentement et la détermination restent entiers », a indiqué à l’AFP Bernadette Groison, sa secrétaire générale : « Le Premier ministre confirme son projet, et on ne sait toujours pas ce qu'il propose pour compenser la fin du calcul des pensions sur les six derniers mois dans la fonction publique. Ce qu'on sait, c'est qu'il faudra travailler plus longtemps, et ça c'est non pour la FSU. »

« Je reste dans le camp des opposants », a déclaré de son côté François Hommeril (CFE-CGC), dénonçant une réforme « de plus en plus dangereuse ». Le 17 décembre, « il n'y aura que le Medef qui ne sera pas en grève », a commenté, ironique, le numéro un de la CGT Philippe Martinez.

Le Medef salue les annonces

Il n'y a en effet que le patronat pour saluer les annonces d'Édouard Philippe. « C’est un bon équilibre entre une réforme qui est redistributive – quand on donne 85% du Smic à tous les retraités – et la nécessité que tout cela doit être financé par quelqu’un. Et donc il faut que, lorsque c’est possible, on travaille plus longtemps », a déclaré Geoffroy de Roux de Bézieux, le patron du Medef à RFI.

Côté politique, l'opposition de gauche comme de droite a rejeté la réforme. « Macron vient d'instaurer la retraite à 64 ans. Ceux qui ont 15 ans sont condamnés au système par point. Les autres sont jetés dans un labyrinthe illisible et piégeux », estime de son côté Jean-Luc Mélenchon. Pour le chef de file de la France insoumise (LFI), le maintien des retraites des grands patrons et les privilèges des assurances privées est « injuste et inéquitable ».

Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national prédit un possible durcissement du mouvement de grève. « Jamais probablement un gouvernement n'aura présenté avec des mots aussi enjolivés une réforme aussi terrible, qui va frapper durement les Français et risque de provoquer un blocage du pays ». Elle considère que pour sortir de la crise il faut un référendum.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a également réagi après les annonces d'Édouard Philippe sur les retraites : « l'allongement de la durée de cotisation, rien ou presque sur la pénibilité, toujours le flou sur les transitions...partenaires sociaux piétinés, c'est non ! » Chez Les Républicains, Guillaume Peltier a quant à lui critiqué « un enfumage ».

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