« Place Ghislaine Dupont, Claude Verlon et Camille Lepage, mortes et mort pour l’information. » Alors que le maire du IIe arrondissement de la capitale dévoile le nouveau nom de la place, l'émotion est palpable parmi la centaine de personnes présentes.
Parmi elles, de nombreux amis, collègues mais aussi des étudiants en journalisme. Car c'est dans un quartier historique de la presse en France où de grands titres ont longtemps étaient installés et où siègent aujourd'hui encore l'Agence France-Presse, que se situe cette place. À deux pas aussi de la prestigieuse école de journalisme de la rue du Louvre.
Le symbole est donc particulièrement fort en cette Journée mondiale de la liberté de la presse. Durant la cérémonie, officiels et proches répètent un même message : l'importance de ne pas oublier ceux qui ont donné leur vie pour cette liberté si fragile, mais aussi de transmettre la mémoire de l'engagement de nos collègues pour l'information.
« La présence de tous ces gens qui les ont connus, c’est un beau témoignage, confie Maryvonne Lepage, la mère de Camille. Mais c’est aussi important de parler de tous ces journalistes qui sont aussi encore pris en otage ou tués, dont les procès n’avancent pas comme celui de Camille, comme celui de Claude et Ghislaine. Et l’information, c’est communiquer aussi sur ces éléments-là qui, malgré tout, sont aussi importants. La justice doit être faite. »
Les circonstances de la mort de Camille Lepage n'ont en effet toujours pas été élucidées, tout comme de nombreuses zones d'ombres demeurent autour de l'assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, malgré la revendication d’al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Marie-Solange Poinsot, la mère de Ghislaine, presse les autorités d'agir : « Il y a un juge, il a de la bonne volonté, il a beaucoup d’humanité, mais il n’a pas les moyens. Alors il faut que le gouvernement lui donne les moyens parce qu’on se fait beaucoup de scénarios, c’est ce que je dis depuis bientôt six ans. Et c’est long. Et moi, j’aurai 90 ans dans peu de temps. Ça sera l’heure du départ et je voudrais savoir. »
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Même attente chez les proches de Claude Verlon. « Ce qu’on demande, c’est de connaître la vérité, savoir vraiment ce qui s’est passé ce 2 novembre 2013 où ils ont été enlevés et assassinés une demi-heure après. ll y a plein de zones d’ombre, plein de questions qu’on se pose. On n’a pas de réponse. Tant qu’on ne saura pas réellement ce qui s’est passé, c’est compliqué de faire le deuil », raconte Marie-Pierre Ritleng, la soeur du technicien de RFI.
Cette place inaugurée hier est donc aussi là pour rappeler le besoin de justice, non seulement pour ces trois reporters, mais aussi pour toute la profession. En 2018, 80 journalistes ont perdu la vie dans l'exercice de leur profession, selon RSF. « Il faut que cela interroge, c'est fait pour ça, explique Hélène Bidard, adjointe à la maire de Paris en charge de l'égalité femmes-hommes et des droits humains. C'est une plaque qui est aussi un message politique à destination des générations futures... »