Loi asile-immigration: rassemblements en France, les parlementaires divisés

A peine présenté devant le Conseil des ministres, le projet de loi asile-immigration est déjà contesté dans la rue. Pour le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, il s'agit d'un texte « totalement équilibré » qui « s'aligne sur le droit européen ».

Alors que le ministre de l'Intérieur s'est réjoui de la présentation du projet de loi sur l'asile et l'immigration en Conseil des ministres mercredi 21 février, plusieurs acteurs de l'asile se sont, eux, mis en grève, à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) mais aussi à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA).

Des rassemblements ont réuni des milliers de personnes dans plusieurs villes de France, notamment à Grenoble, Angers, et bien sûr Paris tout au long de la journée. Dans la capitale, plusieurs centaines de personnes se sont réunies à la mi-journée devant le Conseil d'Etat aux cris d'« Asile en péril » ou « Collomb Collomb, en rétention ».

Au même moment, symboliquement, plusieurs dizaines d'opposants ont répondu à l'appel d'Emmaus dans le 4e arrondissement de Paris. Vêtus de noir, silencieux, ils étaient une centaine à se rassembler dans le froid devant le grand bâtiment de la préfecture de police de Paris, relate notre journaliste sur place Tom Rossi. « Ci-gît l'humanité de Macron » pouvait-on lire sur une grande banderole.

« Législation pour expulser les gens »

« Pour nous c'est vraiment une journée de deuil, affirme Stéphane Melchiorri d'Emmaus international. On nous présente une loi qui est encore plus restrictive que les autres et qui est un vrai recul pour le droit des étrangers. Par exemple, quand un étranger fera une demande de recours, ce ne sera pas suspensif. C'est-à-dire qu'il pourra être expulsé. On invente de la législation pour expulser les gens. »

Après le deuil, la colère. Les slogans résonnent pour contester cette loi qui prévoit aussi de réduire de moitié ces délais de recours. « Cette loi est principalement liberticide. Un des exemples précis c'est l'augmentation des délais de rétention pour les demandeurs d'asile qui voient leurs demandes refusées, explique Sébastien Bailleul, délégué général du Crid, un collectif d'associations françaises de solidarité internationale, au micro de RFI. Alors même qu'on est face à des personnes qui ont vécu des situations d'exil, on va les enfermer et les mettre dans des centres de rétention pour mieux les expulser. »

En fin d'après-midi, plusieurs centaines de manifestants se sont réunis sur la place Saint-Michel, en plein coeur de Paris, à l'appel de l'association Baam (Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants). Le cortège a ensuite défilé jusqu'à l'Assemblée nationale, avec toujours un même mot d'ordre : le retrait de la loi asile-immigration.

Divisions au Parlement

Ce projet de loi « ne sert qu'à faire de la politique » sur les sujets migratoires, a déploré Stéphane Le Foll, l'un des candidats à la tête du PS. A l'inverse, Les Républicains (LR) jugent ce texte trop « laxiste » et ont donc fait des contre-propositions lors du débat parlementaire. Pour sa part, le porte-parole des députés FN, Sébastien Chenu, va plus loin, dénonçant une « imposture » organisant « la subversion migratoire ».

Les esprits sont déjà échauffés par la « circulaire Collomb » sur le recensement des migrants dans l'hébergement d'urgence, que le Conseil d'Etat a refusé de suspendre mardi. La grogne, d'abord cantonnée aux défenseurs des étrangers, a depuis gagné les milieux intellectuels, jusqu'aux proches d'Emmanuel Macron, et une partie des députés En marche qui s'interrogent sur la logique répressive du texte.

Dans un avis critique publié mercredi, le Conseil d'Etat a regretté cet empressement à produire une nouvelle loi, et suggéré des modifications qui ont amené le gouvernement à revoir, sur certains points, sa copie, notamment sur le franchissement illégal des frontières de l'espace Schengen.

(Avec agences)

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