Arbitrage Tapie: Christine Lagarde renvoyée devant la justice pour «négligence»

La Cour de cassation a validé vendredi 22 juillet le renvoi en procès de Christine Lagarde, l'ex-ministre française de l'Economie, pour « négligence » dans la gestion de l'arbitrage Tapie. Une perspective embarrassante pour la directrice générale du Fonds monétaire international qui vient d'entamer un second mandat à la tête de l’institution.

C’est en tant qu’ancienne ministre de l'Économie (2007-2011) de Nicolas Sarkozy que Christine Lagarde devra comparaître, dans des délais pour l'instant inconnus, devant la Cour de justice de la République (CJR), qui juge les délits commis par les membres d'un gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.

Dans son arrêt, la Cour de cassation estime que la commission d'instruction de la CJR, qui l'avait renvoyée en décembre en procès, avait « justifié » sa décision quand elle avait relevé que Christine Lagarde avait « commis des négligences » ayant mené à la destruction, au détournement ou à la soustraction par un tiers de fonds publics. Ce délit est passible d'un an de prison et de 15 000 euros d'amende.

En 2008, cet arbitrage devait mettre un terme au litige vieux de plus de 20 ans entre l'ancien patron de l'Olympique de Marseille et le Crédit lyonnais sur la revente d'Adidas en 1994.

Christine Lagarde est-elle responsable ?

Après cette annonce, l'avocat de Christine Lagarde a regretté le rejet du pourvoi de sa cliente. « La Cour de cassation n'a en rien tranché la question de fond de la responsabilité de madame Lagarde », a prévenu son avocat Patrick Maisonneuve, rappelant que ce débat aurait lieu devant la CJR. « Je suis convaincu que cette dernière écartera toute responsabilité de madame Lagarde », a-t-il affirmé.

Dans un communiqué, le FMI affirme continuer à apporter son soutien à sa directrice générale, exprimant « sa confiance dans la capacité de la directrice générale de s'acquitter efficacement de ses fonctions ».

Première femme à diriger le FMI, Christine Lagarde a connu une ascension très rapide. Avocate d'affaire aux Etats-Unis, ancienne ministre de l'Economie de Nicolas Sarkozy, Christine Lagarde a réussi en dix ans à se hisser au sommet du pouvoir économique mondial.

Propulsée donc à la tête du Fond monétaire international et de ses 189 Etats membres en 2011 Christine Lagarde a dû patiemment redorer le blason de l'institution traumatisée, fragilisée, après la démission fracassante de Dominique Strauss-Kahn.

Christine Lagarde vient d'entamer son deuxième mandat à la tête du FMI et se retrouve aujourd'hui plongée dans une zone de turbulence économique provoquée par le choc du vote sur le Brexit.

Une seule certitude pour cette femme de soixante ans : aucun retour en politique en France même si elle est plébiscitée dans les sondages.


La CJR, une institution très décriée

Depuis sa création en 1993, suite au scandale du sang contaminé, la Cour de justice de la République (CJR) n'a jugé que quatre affaires. Elle a relâché la majorité des ministres poursuivis et ceux qui ont été condamnés, comme Charles Pasqua par exemple, ont écopé de peines de prison avec sursis ou ont été dispensé de peines.

Cette Cour, qui est composée de six députés, six sénateurs et trois magistrats professionnels, est régulièrement accusée d'être trop clémente envers les ministres. Trop lente aussi.

L'hypothèse de la suppression de la CJR qui nécessite une révision de la Constitution est souvent évoquée par la gauche. Le dernier projet en date porté par François Hollande, qui en avait fait une promesse de campagne, a échoué. Le chef de l'Etat a renoncé faute de pouvoir obtenir la majorité des trois cinquièmes au Congrès.

A droite, on estime que les ministres, dans le cadre de leurs fonctions, ne sont pas des justiciables comme les autres et doivent donc être jugés par un tribunal spécifique. En outre, c'est le fonctionnement du gouvernement qui pourrait être perturbé si tout le monde pouvait saisir tout simplement la justice ordinaire. « Il y a toujours des originaux qui attaquent toutes les décisions », expliquait Bernard Accoyer, en 2012. Il était alors président de l'Assemblée nationale.

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