Ce mercredi soir, après le coucher du soleil, Les Damnés de Visconti régneront au palais des papes à Avignon. Devant le gigantesque mur de 30 mètres de haut de la Cour d’honneur, les comédiens du Français vont nous alerter, avec des paroles et des images, sur la montée d’un nationalisme violent.
Les scènes, à l’origine conçues par le cinéaste italien pour raconter l’implosion du système politique des années 1930 et la victoire du national-socialisme, entreront alors en résonance avec nos sociétés bousculées par les crises financières, le terrorisme et les guerres. Pour le metteur en scène belge Ivo van Hove, cette pièce est devenue emblématique de l’émergence de leaders ultranationalistes dans le monde d’aujourd’hui.
Le Festival d’Avignon et le débat sur la culture
Les mesures de sécurité renforcées aux entrées des salles de spectacle rappellent l’omniprésence de la terreur d’aujourd’hui. Après une édition 2015 dédiée aux victimes de Charlie Hebdo, la 70e édition vient après les attentats du 13-Novembre et le score historique du Front national lors des élections régionales.
Pour le Festival d’Avignon, ce lieu par excellence du débat sur la culture en France, c’est également la dernière édition avant les élections présidentielles 2017. Le récent accord sur le statut des intermittents a heureusement calmé les revendications d’une grève.
Tiraillée entre le divertissement proposé par l’Euro 2016 et la culture de l’immédiateté des réseaux sociaux et des médias, la ville-théâtre Avignon proposera encore une fois la possibilité d’une réflexion partagée.
2066, un marathon théâtral
Julien Gosselin, le jeune prodige qui avait fasciné les spectateurs avec sa mise en scène des Particules élémentaires de Michel Houellebecq en 2013, présentera cette fois un marathon théâtral. L’adaptation des 1 400 pages du livre-monde 2066 du Chilien Roberto Bolano explore le mal au XXIe siècle et sera célébrée pendant douze heures sur scène.
Jean-Bellorini, le jeune directeur du théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis, occupera le décor naturel de la majestueuse Carrière Boulbon avec une adaptation de cinq heures des Frères Karamazov de Dostoïevski.
Le corps et le coma, l’univers du Moyen-Orient
Le Moyen-Orient sera présent à travers plusieurs spectacles d’artistes iraniens, syriens, libanais, égyptiens, israéliens… Le jeune chorégraphe libanais Ali Chahrour, 27 ans, interrogera dans ses deux pièces Fatmeh et Leïla se meurt, par exemple, le corps des femmes, la mort et la religion. Et le Syrien Omar Abusaada racontera dans Alors que j’attendais l’histoire d’un jeune homme plongé dans le coma. Une pièce à l’image de son pays d’aujourd’hui : à la fois mort et vivant.
Malgré une édition 2016 raccourcie de trois jours, le Festival d’Avignon parie cette année sur une augmentation du nombre de spectateurs. 125 000 billets sont mis à la vente, soit 2 000 de plus que l’année dernière, sans parler du Festival « off » avec ses 1 416 spectacles programmés et ses 1,3 million d’entrées attendues.
► Le programme du 70e Festival d’Avignon, du 6 au 24 juillet 2016
► Au sein du 70e Festival d’Avignon, RFI présentera pour la quatrième fois son cycle de lectures en public Ça va, ça va le monde !, du 15 au 20 juillet