« La COP fait partie du problème. Elle n’est pas la solution ». Dès l’entrée, rue Curial, une banderole avertit le visiteur du 104 : ici on n’est pas au Bourget. En cette deuxième semaine de COP21, le 104, espace culturel du XIXe arrondissement bien connu des Parisiens, abrite une sorte de contre-conférence sur le climat sous la bannière de la Coalition Climat 21, laquelle rassemble 130 organisations de la société civile.
Elles ne s’en cachent pas, ces ONG sont un peu frustrées à l’heure actuelle de ne pas avoir pu faire assez entendre leurs voix depuis le début de la COP, notamment parce que rassemblements et manifestations ont été interdits par les pouvoirs publics français, suite aux attentats perpétrés à Paris le 13 novembre.
Impliquer le citoyen
Alors que les négociateurs en costume ratiocinent au Bourget sur les textes emberlificotés et les engagements des nations, ici on veut impliquer directement le citoyen puisque, au final, c’est lui qui détient les clefs pour lutter efficacement contre le réchauffement. On met bien sûr en avant toutes sortes d’innovations qui peuvent, à terme, apporter des solutions réelles et durables pour améliorer l’environnement.
« La COP21, franchement, ça ne m’intéresse pas », lance Dany Marie qui est pourtant venue tout spécialement de Port-Louis, capitale de l’île Maurice pour être à Paris durant la quinzaine sur le climat. Cette responsable de formation est venue plaider la cause du développement de l’énergie solaire sur son île où le charbon est encore utilisé comme principale source d’énergie, un mode de consommation très mauvais pour l’environnement. « Une fois utilisé, le charbon est enterré dans les champs de canne et, en bout de chaîne, les déchets finissent dans la mer » explique l’énergique Mauricienne.
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« Avec le CARES (Center for Alternative Research on Economic Studies, ndlr), reprend-elle, on a un projet pour pouvoir produire de l’énergie solaire. Malheureusement, le gouvernement nous met des bâtons dans les roues mais on ne s’arrêtera pas là ». Venue aussi à Paris pour apprendre des autres Dany Marie n’attend rien donc de la COP mais beaucoup des rencontres qu’elle fait ici au 104. Et quand on lui parle d’un possible texte de consensus signé au Bourget, elle hausse les épaules. « Ce sera surtout un consensus capitalistique. Ils vont surtout décider pour eux et pas pour le peuple ».
Le besoin de manifester
Venu pour sa part d’Amsterdam, Markus Schmid paraît plus placide mais lui non plus n’attend rien des négociations sur le climat. Ou si peu. Cet Allemand émigré aux Pays-Bas a fait de la lutte contre l’énergie nucléaire son combat, sous la bannière de l’ONG Wise (World Information Service on Energy). En plus des T-shirts et autres badges « Nucléaire Non Merci » dans toutes les langues vendus pour collecter des fonds, Markus propose aux visiteurs de se faire prendre en photo déguisés en manifestants antinucléaire, avec pancartes sur fond de centrale de Tchernobyl ou de Fukushima grâce à un astucieux montage. Et ça marche !
« Certains disent que le nucléaire c’est la solution pour une énergie propre mais je n’y crois pas une seule seconde. Avec le nucléaire, le gros problème ce sont les déchets. Mais ça, personne n’en parle à la COP21 » insiste-t-il, après avoir pris en photo deux blondinettes toute contentes d’avoir posé en militantes « anti-nukes » devant Tchernobyl. Ravi d’avoir pu échanger avec ses alter egos américains du NIRS (Nuclear Information and Resource Service) et les Français de Sortir du Nucléaire, Markus précise que le directeur de WISE Pays-Bas est en ce moment même dans l’enceinte de la COP au Bourget pour faire du lobbying contre l’énergie nucléaire.
Quant à son séjour parisien, il espère le terminer par une grande marche pacifique dans les rues de la capitale. « Ce fut une grande déception d’apprendre que les rassemblements étaient interdits à cause des évènements » concède-t-il. « A présent, on a l’impression d’être un peu mis à l’écart, même si ici, au 104, on peut échanger et que c’est très instructif ». « C’est très sympa de faire du réseautage, conclut-il, mais ce qu’on veut vraiment c’est faire savoir au monde qu’il y a beaucoup de gens qui se soucient de l’avenir et du climat ».