Avec notre envoyée spéciale à Calais, Alice Pozycki
Le ticket de bus coûte un euro et depuis une semaine, impossible de frauder, le chauffeur est aux aguets. A bord, une dizaine d’Erythréens emmitouflés dans des polaires et des écharpes s'apprêtent à rejoindre les abords du tunnel sous la Manche. Pas de quoi perturber ce Calaisien de 24 ans. « Ils ont droit de prendre le bus comme tout le monde », juge-t-il.
Arrivé dans le centre-ville, il faut descendre pour prendre une autre ligne. Assise sous un abribus, une femme aux cheveux courts lève les yeux au ciel. Elle dit ne plus supporter la présence des migrants. « Ça me gêne, explique-t-elle, parce qu’ils ne sont pas respectueux, ils parlent entre eux, on ne sait pas ce qu’ils disent… Et puis c’est l’insécurité », lâche-t-elle. Alors quand elle est dans un bus et qu’elle voit monter des migrants, elle descend, précise-t-elle.
Un comportement qui intrigue Mohamad Isaac, un Soudanais arrivé à Calais il y a tout juste une semaine. « Je vois parfois des gens qui ont peur de nous, raconte-t-il. Si tu marches sur un trottoir, ils en prennent un autre ! Je ne sais pas pourquoi. C’est parce que je suis noir peut-être ? Je ne sais pas… »
Après quarante minutes de voyage, le petit groupe d’Erythréens aperçoit le terminal du tunnel sous la Manche. A la descente, migrants et Calaisiens ne s’échangeront aucun regard.