Promouvoir le patrimoine culinaire... « La gastronomie fait partie de notre identité […] Peu de pays disposent de produits aussi variés et d’une aussi grande qualité, et peu de pays possèdent une telle diversité de traditions culinaires régionales. Il est important de la faire connaître, de la promouvoir, de la faire vivre. » Les mots de Laurent Fabius sont sans ambages et rappellent combien le repas à la française, inscrit depuis 2010 au Patrimoine mondial de l’Unesco, est un « facteur de rayonnement de la France ».
« Goût de France / Good France » - on peut rester sceptique sur le jeu de mots un peu forcé - poursuit ainsi le double objectif de la mise en avant des terroirs et de l’ouverture sur le monde. Avec un effort accompli pour essayer, tant bien que mal, de rayonner au-delà du halo élitiste qui entoure la haute gastronomie. Enfin, dans le cadre de cette opération, des facilités de visas ont été accordées aux étudiants étrangers en école gastronomique désireux de continuer à se nourrir des enseignements des marmitons du pays.
…partout dans le monde… c’est bien une opération culinaire d’envergure internationale qui mijote ce jeudi soir : 5 continents, 150 pays, 1500 établissements et ambassades françaises, autant de chefs aux fourneaux… Ces derniers sont majoritairement français parmi une dizaine de nationalités différentes. A Paris, sous le haut patronage d'Alain Ducasse, le jury international se félicite d’ores et déjà de la diversité des candidatures reçues : « toutes les générations, tous les styles de restaurants sont présents. Voilà, pour moi, le véritable visage de la cuisine française d’aujourd’hui – une cuisine vivante, une cuisine diverse », se réjouit le multi-étoilé.
Au tableau des médailles : 17 restaurants participants en Allemagne, 18 en Russie, 22 au Royaume-Uni, 42 en Chine, 44 aux Etats-Unis… Sans compter la France, la palme revient à l’Italie avec 98 établissements au compteur et au Japon, où les saveurs et de la haute gastronomie tricolore essaiment depuis bien longtemps, qui grimpe sur la troisième marche du podium avec 61 établissements. Si l’hémisphère nord est bien au rendez-vous, les pays du Sud n’ont pas à rougir. Avec des dizaines de restaurants, 30 pays représentés, l’Afrique, de l’Ouest notamment, a largement répondu à l’appel.
Enfin, en France, au même moment, un grand banquet gaulois sera dressé au château de Versailles où le ministre français des Affaires étrangères recevra les ambassadeurs.
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… en dégustant un repas français... Dans les cuisines, on s’active fiévreusement. Sous les toques, le jus de crâne bout comme le lait sur le feu pour être à la hauteur. La plupart ont déjà mis en ligne leurs menus, so frenchy. « J’ai un menu qui tient la route », plaisante Gérard David, chef et patron de La Croisette à Abidjan qui reçoit tous les jours dans son établissement le sommet du gratin ivoirien. Une seule consigne : confectionner une seule carte « à la française », valorisant la tradition culinaire hexagonale. « C’est la structure et le respect du menu qui compte », rappelle-t-on au Quai d’Orsay. Pas évident de composer un unique met qui plait à tous les palais.
Quelques exemples d’assiettes composées ce jeudi autour du globe :
• une entrée froide :
Le Lutèce Bistro & Wine Bar (Sydney, Australie) proposera une terrine de canard longue cuisson, lobe de foie gras de canard Rougié avec figues épicées et miel
Le San Leonardo (Agua de Oro, Argentine) servira une mousse d’échalotes confites et de tomates séchées et poivrons fumés
• une entrée chaude :
Le Sel et Poivre (Johannesbourg, Afrique du Sud) suggèrera une cassolette de Saint-Jacques au curry léger et dés de pommes vertes
Le Alpejska (Katowice, Pologne) cuisinera une cassolette de fruits de mer à la bretonne
• un poisson ou crustacé :
Le Piaf (Cancun, Mexique) soumettra un filet de poisson, carottes en purée monté à l’huile vierge, « Denisette » crémeux de poireaux et fleurettes de choux fleurs, jolie croquant de poudre d’amande et ses folies, sauce d’oursin et de moules à l’anis étoilé
• une viande ou volaille :
Le Catering Leonov-Rousseau (Moscou, Russie) préparera une caille « baudelairienne », en cocotte truffée aux pommes et navets caramélisés, avec sa barquette de petits légumes vapeur du jardin Vin rouge Château Haut Gay.
El Zarouk (La Marsa, Tunisie) concoctera un canard confit chutney de dattes avec sa garniture parisienne
• un fromage français (ou une sélection) :
Le 2 French Chicks (Los Angeles, Etats-Unis) offrira du Brie au figues fraîches et noix de Pécan
• un dessert au chocolat :
Le Mikuni (Tokyo Japon) élaborera un dôme au chocolat noir laqué avec glace vanille
A l'intérieur de ce cadre imposé, ces artisans, ambassadeurs du bien-manger à la française restent libres de mettre en valeur leur culture culinaire et leurs secrets de maître.
…comme à la Belle Epoque. Il faut cependant rendre à César ce qui lui appartient. Ou plutôt à Auguste Escoffier, « roi des cuisiniers et cuisinier des rois ». Révélé par César Ritz avec qui il se lie d’amitié, Escoffier devient, à la fin du XIXe siècle, la référence incontournable de la gastronomie française : les têtes couronnées d’Europe se succèdent à ses tables, et il est « demandé en Europe, aux Etats-Unis pour mettre en route des hôtels, présider des expositions culinaires, il jouissait d'un grand prestige professionnel », peut-on lire sur le site de la fondation qui porte son nom.
En 1912, à la veille de la Grande Guerre, ce pionnier de la mondialisation imagine un rendez-vous culinaire planétaire : les dîners d’Epicure. Destinés à faire connaître l'excellence de la cuisine française, ils sont dégustés le même jour dans différentes cités. Le premier du genre réunit plus de 4000 convives de par le monde. Le dernier, en juin 1914, est réalisé dans 147 villes différentes pour un total de 10 000 personnes. Alain Ducasse fera-t-il mieux que son Auguste ancêtre ? Réponse ce jeudi soir.
Pour aller plus loin :
Le site Goût de France / Good de France