Conférence sur la paix et la sécurité en Irak à Paris ce lundi

Une «Conférence sur la paix et la sécurité en Irak» se tient ce lundi matin 15 septembre à Paris. Elle a été ouverte par les présidents français et irakien, François Hollande et Fouad Massoum. Il s’agit de coordonner l’action des Etats qui ont choisi de s’engager dans la lutte contre les jihadistes de l’Etat islamique.

Ce lundi à Paris, 26 pays sont représentés, parmi lesquels les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et un fort contingent de pays du Proche et du Moyen-Orient. L’ONU, l’Union européenne et la Ligue arabe participent également à la conférence, en tant qu’organisations internationales.

Il y a en revanche deux grands absents : la Syrie, bien sûr, fermement maintenue à l’écart de la mobilisation contre l’Etat islamique qui sévit aussi sur son territoire. Mais pas question que le régime de Bachar el-Assad redevienne fréquentable au nom de la lutte contre les jihadistes. L’autre absent, c’est l’Iran. La France aurait souhaité sa participation ce lundi à Paris, mais les Etats-Unis et l’Arabie saoudite étaient réticents.

Washington et Téhéran, des alliés objectifs en Irak

Pourtant, comme le remarque Karim Bitar, chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), l'Iran est un acteur incontournable sur le terrain en Irak. « On oublie que l’Iran a déjà des troupes au sol et qu’elle est très active en Irak dans la lutte contre l’État islamique. Le général Ghassem Soleimani coordonne ces activités iraniennes et les activités des milices irakiennes alliées à l’Iran », note-t-il.

Bien que cette coopération avec l'Iran ne puisse pas officiellement être entérinée, en raison notamment de la question du nucléaire iranien, Washington et Téhéran sont de facto des alliés objectifs. « On a vu la semaine dernière l’aviation américaine offrir en quelque sorte une couverture, pendant qu’au sol, c’étaient plutôt des troupes sous influence iranienne qui était en train d’effectuer les principales avancées, et notamment la ville d’Amerli », rappelle le chercheur.

A l’issue de la conférence, une déclaration en dix points sera rendue publique. De source diplomatique française, on parle d’un « plan d’action », d'une « feuille de route » contre l’Etat islamique. Mais pour des raisons évidentes, il ne faudra pas y chercher de précisions sur la nature ni le calendrier de l’engagement militaire des uns et des autres. Le texte devrait faire référence à la résolution 2170 de l’ONU adoptée le mois dernier pour donner un cadre juridique international à la lutte contre les jihadistes ultra-violents de l’Etat islamique.

Et c'est d'ailleurs l'acronyme arabe Daesh qui devrait être employé dans le communiqué final de la conférence, les dirigeants français ayant choisi de ne plus utiliser l'appellation « Etat islamique ».

John Kerry satisfait

Alors que se préparait cette conférence, le secrétaire d'Etat américain John Kerry achevait une tournée dans la région pour travailler à la mise en place d'une grande coalition contre l'EI. Dans une interview à la chaîne de télévision CBS, il a précisé ses principaux objectifs : répondre à l’urgence humanitaire, prévenir le danger que représentent les combattants étrangers enrôlés avec les terroristes, combattre et éliminer la menace militaire sur le terrain. Des objectifs qui seront donc discutés lors de la conférence de Paris, qui va également permettre de faire le point sur la coalition en cours de constitution.

Et sur ce point, John Kerry est déjà satisfait, nous indique notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio. D’après les informations diffusées par le département d’Etat, les Etats-Unis ont obtenu le soutien recherché, auprès des pays sunnites proches de l’Irak et de la Syrie. La Ligue arabe s’est engagée politiquement. Plus concrètement, l’Arabie saoudite se dit prête à former l’opposition syrienne modérée. Le Koweit, le Qatar, Bahreïn, assureraient l’utilisation d’infrastructures militaires. Et sur le plan humanitaire, Riyad va verser une contribution de 500 millions de dollars au Haut commissariat pour les réfugiés, la Turquie, qui ne devrait pas participer à l’effort militaire, promet de s’engager, elle aussi, dans l’aide aux réfugiés. « Nous ne préparons pas une intervention au sol. Certains alliés ont proposé de le faire, mais ce n’est pas ce que nous recherchons dans l’immédiat. Ce que nous faisons, aujourd’hui, c’est élaborer les grandes lignes de la stratégie », a déclaré le chef de la diplomatie américaine.

On connait les réticences de Barack Obama, qui a longtemps repoussé l’échéance d’une intervention en Irak, mais surtout en Syrie. Le soutien français apparaît alors d’autant plus précieux pour les États-Unis, à la recherche d’une légitimité internationale. « Aujourd'hui, tout le monde réalise que la France avait pris la juste position en 2002-2003 en s'opposant à cette guerre [en Irak], remarque encore le chercheur Karim Bitar. Et tout ce qu'avait prédit à l'époque la diplomatie française s'est réalisée. On avait clairement annoncé en France qu'une invasion de l'Irak sur des prétextes fallacieux allait offrir à al-Qaïda un immense champ d'entraînement et faire de ce pays un laboratoire du terrorisme international ». 

Or cette légitimité internationale recherchée par les Etats-Unis ne pourra pas passer des Nations unies, car les Russes, hostiles à toute intervention en Syrie, peuvent opposer un veto.

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