Yann Moix remporte le prix Renaudot avec «Naissance»

Quand Pierre Lemaitre avait besoin de douze tours pour s’imposer contre Arden de Frédéric Verger au prix Goncourt, Yann Moix a remporté ce lundi 4 novembre le prix Renaudot dès le premier tour avec Naissance, une autobiographie de presque 1200 pages qui porte sur son enfance et sa volonté de détachement de ses parents.

Avec ce roman en XXL,Yann Moix, né le 31 mars 1968 à Nevers dans la Nièvre, est probablement né une deuxième fois en tant qu’écrivain. En 1996, il avait reçu pour Jubilations vers le ciel le prix Goncourt du premier roman.

« Pour moi, l'enjeu était de taille. » Au début de son roman, Yann Moix voyait juste. Naissance lui a fait gagner le prix Renaudot. C’est sa propre venue au monde sous les insultes de ses parents qui ouvre les 1 143 pages truffées d’autodérision et d’accusations : « Il surécrit ! s'était scandalisé mon père à la sortie de mon premier roman. Je ne comprends pas qu'on ait pu donner le Goncourt, même des bacs à sable, à une telle surenchère d'outrancières épithètes ! Nul. Zéro. À dégager ! Qu'on ne compte pas sur ma mansuétude, ni sur ma pitié, pour ranger cette cagade dans ma bibliothèque. (…) Cet écrivain nul, cher lecteur, vient d'achever le livre que tu tiens entre les mains - ce livre est épais, glanduleux, visqueux, radical, oblong, coupant, muni de poils étoilés, il est (grossièrement) denté, il est purpurin, jaune pâle, tube, il est bracté, il est cilié. »

Cet objet étrange de littérature

Contrairement à son roman Panthéon (2006) où il décrit son environnement et sa jeunesse à Orléans comme fils indésiré né dans une famille réactionnaire et bourgeoise, Naissance pousse le récit beaucoup plus loin. Avec ses parents biologiques dont un père universitaire à la faculté de sciences d’Orléans, Yann Moix n’est plus en contact, mais il souligne de ne pas régler de comptes avec eux : « Je récuse simplement la notion de parents. »

Dans cet objet étrange de littérature sans limite, se promènent des personnages de toutes sortes et l’on visite des lieux bizarres comme le « Bureau municipal d'enregistrement des prénoms composés » ou un « Salon de l'enfance battue ».

Une littérature en mode illimité

« Naissance d’Yann Moix, à dévorer ou à vomir » s’est ouvertement demandé le journal La Tribune de Genève déjà fin septembre. A 45 ans, Yann Moix a quelques écrits à scandale derrière lui. Dans Partouz, il fait une liaison entre la peur du plaisir sexuel et les terroristes islamistes d’al-Qaïda lors des attentats du 11-Septembre. En février 2010, en publiant un extrait de son prochain livre La Meute, il dénonce « la chasse » des réseaux sociaux contre Roman Polanski, accusé de viol d’une mineure, et traite la Suisse de « pute » et de « Gestapoland », parce qu’elle avait arrêté le cinéaste sous le coup d’un mandat d’arrêt américain. Il y aussi ses pamphlets contre les écrivains Alexandre Jardin et Amélie Nothomb qui ont fait couler beaucoup d'encre. Avec Naissance, Yann Moix semble avoir réussi à obtenir un consensus autour de sa littérature en mode illimité.

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Naissance, de Yann Moix, éditions Grasset, 1 143 pages, 26 euros.

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