La Cour des comptes dénonce la hausse des péages autoroutiers

La Cour des comptes vient de publier un rapport très sévère mettant en cause une augmentation jugée excessive des péages autoroutiers. Mais plus encore que les sociétés privées qui gèrent les autoroutes, la Cour des comptes dénonce la faiblesse de l'Etat, censé négocier les augmentations de tarifs avec ces sociétés concessionnaires.

Les Français qui se lancent ces jours-ci sur les autoroutes des vacances s'en seront rendus compte : les péages d'autoroute ne cessent d'augmenter. Et ce n'est pas qu'une impression, car la Cour des comptes relève qu'entre 2006 et 2011, ils ont augmenté de 4% par an alors que l'inflation n'a été, durant cette période, que de 8%. On pourrait penser que les sociétés privées qui ont en concession les trois quarts des 8 900 kilomètres d'autoroutes françaises profitent de leur situation pour gonfler sans vergogne leurs bénéfices. Et de fait, les concessionnaires ont engrangé 7,5 milliards d'euros de péages en 2011. Mais la réalité est plus complexe. Les sociétés autoroutières qui se partagent le territoire négocient avec l'Etat français qui leur concède cette activité.

Travaux et hausses de tarifs

Et c'est bien là le problème. En effet la Cour des comptes estime que l'Etat entretient avec les sociétés concessionnaires des rapports déséquilibrés, à son désavantage alors qu'il concède à des sociétés privées une partie du service public des transports, et au détriment des consommateurs, les automobilistes. Tous les cinq ans, l'Etat et les sociétés d'autoroutes concluent des contrats de plan : les gros travaux d'investissements réalisés dans la période peuvent être compensés par des augmentations de tarifs. Mais cette procédure devait, à l'origine, être exceptionnelle et ne concerner que les opérations exceptionnelles.

Normalement ce sont les bénéfices des sociétés qui doivent financer les investissements. Or, la Cour des comptes souligne que « travaux = hausse des péages » est devenu la règle et que tous les frais engagés par les sociétés d'autoroutes leur donnent prétexte à augmentation de tarifs. Y compris, par exemple, l'introduction du télépéage qui a pour effet, à terme, de réduire les dépenses de personnel et donc d'accroître leurs profits.

Montrer ses muscles

Face à ces accusations, les sociétés d'autoroutes répondent qu'elles respectent scrupuleusement les termes des contrats de concession. Ce qui revient donc indirectement à justifier les critiques de la Cour des comptes lorsqu'elle dénonce le manque d'exigences de l'Etat face à ces sociétés quand il s'agit de négocier les contrats de plan ou d'en surveiller la réalisation. L'Etat, en la circonstance le ministère des Transports, est dans un rapport de force défavorable avec des sociétés comme Vinci autoroutes, ou Eiffage, des sociétés influentes, adossées à de grands groupes de BTP.

Les sages de la rue Cambon invitent donc le gouvernement à montrer davantage ses muscles et pour cela à associer aux négociations le puissant ministère de l'Economie et des Finances afin de traiter sur un meilleur pied. La Cour des comptes préconise plus de rigueur et de transparence dans les contrats et, une fois qu’ils sont conclus, le recours systématique à des contrôles sur les coûts réels des investissements. Mais aussi la mise en œuvre si nécessaire de pénalités en cas de non respect des obligations par les concessionnaires.

Privatisation / nationalisation

La Cour des comptes plaide aussi pour la fixation d'un plafond d'évolution des hausses des péages. Au ministère des Transports, on assure dès à présent que les recommandations seront suivies.

De plus, ce pavé dans la mare lancé par la Cour des comptes relance le débat sur la nationalisation des sociétés d'autoroutes. En 2006, lorsque le gouvernement de Dominique de Villepin décide de privatiser les sociétés françaises d'autoroutes, des voix s'élèvent pour dénoncer une opération à courte vue. L'Etat, affirment les opposants à la privatisation, se prive des recettes futures des péages, un pactole qui représente bien plus que le montant de la vente, 11 milliards d'euros à l'époque !

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