Avec notre envoyée spéciale à Brétigny-sur-Orge, Léa Ticlette
Les enquêteurs ont commencé leur travail ce samedi 13 juillet. Une demi-douzaine d'officiers de la police judiciaire sont sur place. Les officiers de la police ferroviaire sont aussi arrivés avec leurs blousons estampillés « SNCF ». Ils assurent l’enquête interne à la compagnie ferroviaire.
Trois enquêtes ont été ouvertes. En fin de matinée, la compagnie ferroviaire a fait savoir qu'une pièce de métal défaillante dans l'aiguillage de la voie aurait provoqué l'accident. Pierre Izard, le directeur général des infrastructures de la SNCF explique qu'il s'agit d'une « éclisse », une sorte d'agrafe en acier reliant deux rails. La pièce se serait « désolidarisée et détachée ». Elle « est venue se loger au centre de l'aiguillage » situé à quelque 200 mètres en amont de la gare « empêchant le passage des roues du train ». Le président de la SNCF, Guillaume Pépy, a aussi annoncé que des contrôles allaient être effectués sur toutes les pièces semblables.
D'ailleurs, ce samedi 13 jullet, le ministre des Transports Frédéric Cuvillier a affirmé lors d'un entretien pour RTL, que la catastrophe n'est pas due « à un problème humain ». Il a précisé que les enquêteurs devaient désormais vérifier « soit le matériel roulant, soit les infrastructures et précisément la zone de l'aiguillage ».
L'état des lignes ferroviaires remis en cause
Les usagers de la ligne se sont fait entendre. Ils pointent du doigt une ligne Paris-Limoge mal entretenue où les incidents sont fréquents. D’ailleurs la SNCF elle-même avait déclaré que cette ligne était « malade » en 2011. La société ferroviaire l’a dit : « Des travaux ont été réalisés tout récemment tout près du lieu de la catastrophe pour remédier à un défaut majeur ». Mais d’après son PDG, Guillaume Pepy, ces travaux étaient sur une autre voie.
A ce sujet, l'Association des voyageurs usagers du chemin de fer, Avuc, a réagi et dénoncé « le temps des trains poubelles » et « la vétusté » du matériel. Le porte-parole de l'association Willy Colin décrit des « convois de bric et de broc ». « On ajoute des voitures de Corail aux voitures des Intercités », a-t-il affirmé.
Le ministre des Transports a assuré que la locomotive et les wagons « étaient à jour de
toute vérification ». Cependant, « cela ne voulait pas dire que nous pouvions nous satisfaire d'avoir du matériel roulant qui a 30 ans d'âge ». Frédéric Cuvillier a rappelé la nécessité de moderniser « les lignes classiques ».
Poursuite des opérations
Dans la journée, les wagons doivent être levés. Ce matin, trois des quatre wagons accidentés étaient encore couchés entre les quais et les voies. Cette opération doit être assurée par une grue qui est arrivée par les rails. Ce sera long puisque les wagons sont très imbriqués. La circulation des trains au départ et à l'arrivée de la gare Paris-Austerlitz a été suspendue.
D'après la maire de Brétigny-sur-Orge, « il n'y a plus de victimes sur les voies ». Le bilan ne devrait donc pas s'alourdir.
Les habitants de Brétigny sous le choc
Des wagons se sont donc renversés vendredi 12 juillet lorsque le train a déraillé. Un choc d’une violence inouïe. La catastrophe s’est déroulée sur plusieurs centaines de mètres. Des morceaux de ballasts, de graviers ont même été retrouvés dans la ville de Brétigny-sur-Orge. Les habitants de cette commune de l’Essonne ont été très touchés par la catastrophe.
Les témoins sont catégoriques : c'était un véritable spectacle de désolation avec un nuage de poussière et des cris. Idriss est arrivé à la gare deux minutes après l’accident. Son premier réflexe a été de sortir son smartphone pour filmer la scène. Il n’en revient toujours pas : « Je suis monté sur le quai, les gens courraient de partout. La première chose que j’ai vue, c’est une scène désastreuse. Tout était complètement cassé, wagons retournés. C’est "flippant" quand même parce qu’on se dit que ça peut arriver à n’importe qui en fait ».
La surprise et la peur, c’est aussi ce qui a étreint Ayoub avant de passer à l’action car lui et ses amis ont immédiatement porté secours aux victimes malgré l’interdiction de la SNCF : « Quand je suis arrivé, j’ai été sous le choc pendant à peu près 10 secondes. Je voyais les gens, ils frappaient de partout, ils criaient. Cela m’a choqué. J’ai voulu d’abord sauver en priorité les enfants, ensuite les personnes âgées, ensuite les personnes malades et ensuite ceux qui peuvent tenir comme les hommes. »
Dans le centre-ville, au gré du périmètre de sécurité, certains habitants de Brétigny ont encore un peu de mal à réaliser. Beaucoup n’ont rien vu, ni entendu, mais tout le monde en parle.