L'affiche de l'exposition présente l'une des peintures emblématiques de Keith Haring qui nous transmet le message de cet artiste de génie, mort prématurément du sida en 1990, à l’âge de 31 ans. « C’est une bâche jaune et on a une figure en noir, bordée de rouge, qui lève les bras vers le ciel, explique la commissaire de l’exposition Odile Burlulaux. Et cet individu présente un énorme trou dans son estomac. À travers ce trou viennent passer des chiens qui sont en fait tous les mouvements qui nous animent, mais aussi toutes les coercitions, toutes les obligations qui nous sont imposées, tout ce que nous acceptons et qui peut nous déchirer ou de nous faire mal. »
Pour la première fois, dans cette exposition, on met l'accent sur la dimension politique de l'œuvre de Keith Haring. Il s'est engagé à côté des communautés d'artistes noirs ou homosexuels, des artistes issus du milieu du hip-hop, et dans la lutte contre le racisme, comme dans cet hommage à Michael Stuart, un graffiteur mort en prison. « On voit deux croix rouges qui montrent les deux endroits où, selon lui, le racisme est terrifiant : ce sont les États-Unis et l’Afrique du Sud. Il se déverse de cette planète un flot de sang dans lequel viennent mourir des personnes de toutes couleurs. On y voit aussi la dénonciation des personnes qui ne font rien, alors qu’il pense vraiment, en tant que citoyen, on a la possibilité de se manifester et d’agir et de changer le sens des choses. »
Tout au long de sa courte vie, Keith Haring a peint pour dénoncer les abus de la société : la menace nucléaire, celle des multimédias, l'illettrisme, la drogue et le sida. Au Centquatre, on est pris par l'émotion devant les peintures de son œuvre monumentale Les Dix commandements, un ensemble de dix panneaux de sept mètres de haut. « Il a pris le principe des Dix Commandements pour dire : j’ai envie de donner dix attentions, dix règles, dix précautions, que les individus doivent prendre. Mais, poursuit José Manuel Gonçalves, le directeur du centre culturel Centquatre, c’est totalement métaphorique, parce que, après, il y a des signes qui sont très clairement envers l’État : l’argent par exemple. Attention à la cupidité. Il a donc repris le principe des Dix Commandements comme idée, et puis, il l’a développé d’une manière complètement différente. »
À travers la Fondation qu'il a créée en 1988 pour les enfants défavorisés et lutter contre le sida, le combat de Keith Haring continue encore aujourd'hui.
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Keith Haring, The Political Line, exposition au Musée d'art moderne de la ville de Paris. Le centre culturel Centquatre prolonge la rétrospective en présentant les œuvres grand format de l'artiste, notamment l'une de ses plus importantes, Les Dix Commandements, créée en 1985. Jusqu'au 14 août.