Louvre-Lens: acte fou ou politique derrière l’attaque contre «La Liberté guidant le peuple» ?

C’est la figure de proue du Louvre-Lens et le chef d’œuvre absolu de Delacroix qui a été vandalisé ce jeudi 7 février 2013 au soir. Une femme de 28 ans a défiguré la toile monumentale La Liberté guidant le peuple avec une inscription mystérieuse, tracée au marqueur. Les motivations de cet acte restent encore à éclaircir.

La scène s’est déroulée jeudi soir, quelques minutes avant la fermeture du Louvre-Lens. Une femme de 28 ans s’est approchée du tableau, situé à la fin du parcours de la Grande Galerie du temps du nouveau musée. Elle a franchi la toute petite barrière de mise à distance - plus symbolique que réelle - et a tagué le tableau avec une inscription à l’encre indélébile. Appréhendée par un agent de surveillance aidé d’un visiteur, la femme a été immédiatement interpellée et placée en garde à vue, mais le mal était fait. Heureusement, l'inscription était superficielle. Avec soulagement, le musée a déclaré ce vendredi après-midi qu'elle a pu être « intégralement retirée » par une restauratrice dépêchée sur place. Quant à l'auteur du vandalisme, selon Philippe Peyroux, le procureur en charge de l’affaire, « c’est plutôt une personne déséquilibrée ». Pour l’instant on attend les résultats de l’examen psychiatrique de la femme mise en garde à vue. Elle risque sept ans de prison et 100 000 euros d'amende, la peine prévue pour dégradation d'un objet culturel confié à un musée.

« AE 911 »

Le tag d’une trentaine de centimètres de long sur six centimètres de haut, en bas à droite du tableau, affiche l’inscription mystérieuse « AE 911 » sur la toile monumentale. Le code, tapé dans les moteurs de recherches, donne accès à plusieurs sites de conspirations qui mettent en doute la version officielle des attentats du 11 Septembre 2001 aux Etats-Unis. AE 911 se réfère au nom d’une organisation non-gouvernementale qui rassemble des architectes et ingénieurs qui ont travaillé sur la crédibilité des arguments avancés par le rapport officiel des autorités américaines. Alors acte d’une personne déséquilibrée ou revendication politique ? L’enquête judiciaire apportera peut-être des réponses sur le mobile de cette femme domiciliée dans la région Pas-de-Calais.

L'art et le risque

Reste à savoir quelle leçon à retirer de cette affaire. Mettre les chefs d’œuvre comme La Liberté guidant le peuple derrière une vitre pare-balles comme La Joconde ? Cela l’a sauvée de la lancée d’une tasse d’un touriste russe en août 2009. Ce qui est sans doute justifié pour La Joconde, s’avère trop cher, très peu accueillant et pas toujours efficace pour les autres. En avril 2011, au musée d’art contemporain à Avignon, des fondamentalistes catholiques avaient brisé la plaque de plexiglas posée sur le tableau Piss Christ d’Andres Sorrano avant d’agresser la toile, jugée blasphématoire, au tournevis. L’art, pour rester proche des gens, doit rester le plus accessible possible. Malgré les précautions de sécurité renforcées, cela inclut le risque d’être détérioré, comme c’était aussi le cas d’un tableau de Rothko, Black on Maroon, vandalisé en octobre 2012 au feutre noir à la Tate Modern de Londres par « amour fou » d’un artiste autoproclamé.

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