On nous le répète tant et tant, chaque fois qu’on s’expose au soleil, il faut se protéger. Alors, bons élèves, à chaque période de vacances, à la mer comme à la montagne, nous faisons le plein de produits solaires. Censés nous protéger des méfaits du soleil, ils offrent toute une gamme d’indices allant de 6 à 60. Chacun, selon sa carnation ou son phototype comme disent les dermatologues, devrait alors trouver la protection adaptée.
Promesses non tenues
Tout cela semble bien simple : à protection élevée, indice élevé. Certes, mais en vérité c’est loin d’être si clair si on en croit la professeure Laurence Coiffard qui vient de jeter une belle pagaille dans ce monde prospère des fabricants de produits solaires. Selon cette directrice du laboratoire Pharmacie industrielle de cosmétologie de l’université de Nantes, de 25 à 30 % de ces produits surestiment leur niveau de protection.
Pour le démontrer, la Pr Coiffard a testé 32 crèmes in vitro, c’est-à-dire en laboratoire. Et le résultat publié par le quotidien Libération est parlant : pour environ le quart des produits, l’écart entre la protection revendiquée et la réalité est mesurable et parfois important.
Ainsi, la crème UV Bio peaux fragiles et enfants revendique un indice de 50 ; contrôlée par l’équipe de Nantes, elle n’obtient plus qu’un score de 18 ! Un autre produit bio, lui aussi destiné aux enfants, Lovea Kids Bio indice 30, n’offrirait en réalité qu’un indice de 9… De la même manière Avène spray sensitive skin qui prétend à un indice de 60, n’aurait qu’un coefficient protecteur de 41. Les crèmes dites minérales ou biologiques sont particulièrement dans le collimateur de la chercheuse qui leur reproche leur manque de fiabilité.
A l’inverse, quelques-uns offrent plus qu’ils ne promettent. C’est le cas notamment de Galénic soin soleil à l’uncaria d’Amazonie dont l’indice 30 est en réalité de 58 et Roc Soleil protection enfants qui bat le record avec une promesse de 50+ qui atteint en fait l’indice de 108 !
Des méthodes contestées
Pour Laurence Coiffard, ces 25 à 30% de produits qui ont un indice inférieur à ce qui est annoncé posent un problème de santé publique. « Cela est intolérable, dit-elle, quand on sait qu’il y a près de 10 000 nouveaux cas de mélanome par an, la forme la plus grave de cancer liée au soleil. Ça l’est encore plus pour les produits destinés aux enfants, qu’une maman va utiliser en pensant, à tort, que son enfant est bien protégé ».
La Pr Coiffard est loin d’être une néophyte dans le domaine des produits solaires. Experte en cosmétiques elle en est à sa trentième étude publiée sur les crèmes de protection solaire. Mouton noir des industriels, sa dernière publication ne va pas les amadouer. D’autant plus qu’ils sont déjà vent debout contestant ses tests en labo alors qu’eux, tout comme l’Agence nationale de sécurité du médicament (Ansm), privilégient la méthode in vivo. Cette dernière consiste à évaluer sur l’homme l’efficacité des produits en comparant le temps d’apparition d’une brûlure sur une peau nue et sur une peau protégée.
Un argument qui laisse de marbre la chercheuse qui constate néanmoins que les tests in vivo sont préférés par les fabricants parce qu’ils permettent d’obtenir des résultats plus favorables en ajoutant par exemple des anti-inflammatoires ou en réalisant les tests l’hiver par exemple… En somme, résume Laurence Coiffard forte de son expérience, les normes des tests sont faites par l’industrie pour l’industrie.